"... to vindicate the honor of the human race..." — Thomas Jefferson
AM | @HDI1780
- The Trade of Marseilles. Dated from Marseille (9 May 1787), Thomas Jefferson receives a letter from Stephen Cathalan, Jr. (*). Here's the interesting part:
SIR Marseilles the 9th. May 1787. I hope this Letter will meet your Excellency at Cette [Sète], and on that account I direct it to M. Meinadier. I dare say, you have been pleased in Seing the famous Fontain of Vaucluse, as famous, by the lampid waters Spliting with a great noise against the rocks, as it is by the Loves of Petrarch and Laura [...] I remit you here inclosed the Copy, of the general Idea of the trade of Marseilles, by abbe raynal. I will Send one to Thos. Barclay Esqr. as Soon as I will have of his Letters, till now I have received none.
Jefferson's correspondent must be refering to the text of the second prize sponsored, but not written, by Raynal, at Académie de Marseille under the title: "Les causes de l'accroissement du commerce de Marseille et les moyens d'en assurer la prospérité". (The first prize, dated from 1786, was on criminal procedure). There is very little information on this issue. According to Gilles Bancarel, "Nous ne connaissons pas, faute d'informations, l'issue qui fut réservée à ce second prix" (Raynal ou le devoir de vérité. Paris: Honoré Champion, 2004, p. 377).
(*) Julian P. Boyd (ed.) The Papers of Thomas Jefferson, Vol. 11. Princeton University Press, 1955, p. 357.
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- Too good to be true? The story about the dinner party in Passy, in which Raynal and his French colleagues are shown to be much shorter than Franklin and his American friends (thus refuting the degeneracy theory), is probably too good to be true. On 15 October 1787, William Carmichael sends Jefferson a letter containing a (slightly) less memorable account (*). Note that Raynal is not even counted among those attending:
I have received with great pleasure your Notes on Virginia and as yet have given them but a Cursory perusal. I think you have victoriously conbatted Buffon, Monsr. de P. and the Abbé Raynal. I do not know whether Dr. Franklin ever mentioned to you what passed at a Dinner at Paris at which I was present, on that contested point. At Table some one of the Company asked the Doctor what were his Sentiments on the remarks made by the Author of Recherches sur l'Amerique. We were five Americans at Table.
The Venerable Doctor regarded the Company and then desired the Gentlemen who put the question to remark and to Judge whether the human race had degenerated by being transplanted to another section of the Globe. In fact there was not one American present who could not have tost out of the Windows any one or perhaps two of the rest of the Company, if this Effort depended merely on muscular force. We heard nothing more of Mr. P's work and after yours I think we shall hear nothing more of the opinions of Monsr. Buffon or the Abbé Raynal on this subject.
(*) Julian P. Boyd (ed). The Papers of Thomas Jefferson, Vol. 12. Princeton University Press, 1955, pp. 240-241.
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- The Report on Fisheries. For all his personal dislike of Raynal, the fact remains that Jefferson always cherised his Histoire des deux Indes volumes, not least because of their value as a source of statistical information. Thus, in his 1791 "Report on American Fisheries by the Secretary of State", Jefferson quotes the abbé (*). I don't have that text with me now, but it is worth noting that Jefferson's 1791 reports "incited Congressional emotions against British behaviour" [see]. This seems to correspond with the general tone of HDI 1780.XVI, where Raynal despairs about the power of the British and their ambition to establish themselves as the dominant force in North American fisheries.
(*) Julian P. Boyd (ed.) The Papers of Thomas Jefferson, Vol. 19. Princeton University Press, 1974, p. 210.
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Friday, April 13, 2012
JEFFERSON & RAYNAL (PART IV)
Thursday, April 12, 2012
AM | @HDI1780
The Société d'Etude Guillaume-Thomas Raynal announces the 2013 ANNÉE RAYNAL to commemorate "le tricentenaire de la naissance du philosophe Guillaume-Thomas Raynal. Né à Lapanouse de Séverac 12 avril 1713, décédé à Chaillot le 6 mars 1796". The Société is chaired by Gilles Bancarel, author of the most up-to-date Raynal biography: Raynal ou le devoir de vérité (Paris: Honoré Champion, 2004) (*).
From the short Raynal biography publised on the website:
C'est en 1770 que parait à l'étranger et sous l'anonymat l' Histoire philosophique et politique des établissements et du commerce des Européens dans les deux Indes. Introduit en France en 1772, le livre qui conteste le pouvoir royal et le pouvoir religieux fait scandale. Il est aussitôt interdit par un arrêt du Conseil. En 1774, parait une nouvelle édition plus virulente dans laquelle Diderot et Raynal s'enflamment, et où apparaît le portrait de l'auteur ; elle est aussi tôt mise à l'Index par le clergé.
Une troisième édition encore plus violente est publiée en 1780. Le Parlement de Paris condamne l'ouvrage à être lacéré et brûlé par la main du bourreau en place publique [...] Après plus de 200 ans d’oubli, près de 50 années de travaux scientifiques sont parvenus à replacer le philosophe Raynal au cœur de l’histoire contemporaine, comme il était naguère au cœur de l’Europe des Lumières et présent par son livre sur tous les continents.
Il est devenu aujourd'hui fondamental de redonner sa place à une œuvre phare du patrimoine culturel français, témoignage du génie des Lumières et véhicule, hier comme aujourd’hui, des valeurs humanistes et républicaines. Les manifestations du Tricentenaire sont destinées à dévoiler la portée universelle et le rôle planétaire de Raynal dans la conquête des Droits de l'homme et du citoyen et sa place capitale en tant que précurseur de la lutte contre l'esclavage et promoteur de l’idéal républicain.
(*) In 2011, Mr. Bancarel edited the volume Raynal et ses réseaux, also published by Honoré Champion [see].
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Wednesday, April 11, 2012
TURGOT
"...un genre de vexation aussi odieux..." — Turgot
AM | @HDI1780
Les écrits de Anne-Robert-Jacques Turgot sur le crédit et les taux d'intérêt constituent une source importante de l'Histoire des deux Indes. Il s'agit bien entendu d'un très vaste sujet, sur lequel je reviendrai souvent. Dupont de Nemours, l'éditeur de Turgot, affirme que le Mémoire sur les prêts d'argent fut imprimé au moins deux fois en 1769 (*). On y retrouve l'idée —formulée dans HDI 1780, iii.1, p. 264— selon laquelle l'argent est une marchandise comme les autres: "Il est nécessaire que l'argent y soit considéré comme une véritable marchandise dont le prix dépend de la convention, et varie comme celui de toutes les autres marchandises, à raison du rapport de l'offre à la demande" (p. 290).
Dans son Mémoire, Turgot se déchaîne contre la protection que les tribunaux d'Angoulême fournissent aux "fripons" qui ne respectent pas leurs engagements, ce qu'il trouve "aussi scandaleux que funeste au commerce". Or, c'est exactement le sujet abordé par Raynal et Diderot à propos du crédit dans les colonies françaises (HDI 1780, xiii.54):
L'autorisation donnée à la mauvaise foi des emprunteurs [...] La loi ne protégera que ceux qui sont indignes de sa protection. (Turgot, pp. 275, 285).
...le ministère encourage la mauvaise foi en lui offrant un asyle sous la protection de la loi, car si la loi ne poursuit pas elle protège... (HDI 1780, xiii.54).
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...l'espèce de jurisprudence qu'on vouloit établir... (Turgot, p. 263)
Ces calamités [...] ont donné naissance à une jurisprudence favorable aux débiteurs... (HDI 1780, xiii.54).
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(*) Œuvres de Mr. Turgot, Tome V. Paris: Delange, 1808.
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"...un genre de vexation aussi odieux..." — Turgot
AM | @HDI1780
Les écrits de Anne-Robert-Jacques Turgot sur le crédit et les taux d'intérêt constituent une source importante de l'Histoire des deux Indes. Il s'agit bien entendu d'un très vaste sujet, sur lequel je reviendrai souvent. Dupont de Nemours, l'éditeur de Turgot, affirme que le Mémoire sur les prêts d'argent fut imprimé au moins deux fois en 1769 (*). On y retrouve l'idée —formulée dans HDI 1780, iii.1, p. 264— selon laquelle l'argent est une marchandise comme les autres: "Il est nécessaire que l'argent y soit considéré comme une véritable marchandise dont le prix dépend de la convention, et varie comme celui de toutes les autres marchandises, à raison du rapport de l'offre à la demande" (p. 290).
Dans son Mémoire, Turgot se déchaîne contre la protection que les tribunaux d'Angoulême fournissent aux "fripons" qui ne respectent pas leurs engagements, ce qu'il trouve "aussi scandaleux que funeste au commerce". Or, c'est exactement le sujet abordé par Raynal et Diderot à propos du crédit dans les colonies françaises (HDI 1780, xiii.54):
L'autorisation donnée à la mauvaise foi des emprunteurs [...] La loi ne protégera que ceux qui sont indignes de sa protection. (Turgot, pp. 275, 285).
...le ministère encourage la mauvaise foi en lui offrant un asyle sous la protection de la loi, car si la loi ne poursuit pas elle protège... (HDI 1780, xiii.54).
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...l'espèce de jurisprudence qu'on vouloit établir... (Turgot, p. 263)
Ces calamités [...] ont donné naissance à une jurisprudence favorable aux débiteurs... (HDI 1780, xiii.54).
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(*) Œuvres de Mr. Turgot, Tome V. Paris: Delange, 1808.
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Tuesday, April 10, 2012
JEFFERSON & RAYNAL (PART III)
"...nous pouvons opposer à l'Abbé Raynal un Washington..." — Jefferson
AM | @HDI1780
While working in Amsterdam on my book on Mariano Moreno, back in 2008, I made the decision to leave the "Jefferson and Moreno" chapter to the last minute (*). I was brimming with confidence; after all, I had read most of the Notes on the State of Virginia (the book quoted by Moreno in Gazeta de Buenos-Ayres, 28 November 1810), and the library of the Universiteit van Amsterdam had plenty of resources. But as soon as I started with the chapter, I realized that things were more complex than I had anticipated.
The passage quoted by Moreno —on the 'federal' structure of Indian tribes— was absent from the main part of the Notes. And the title —Observaciones sobre la Virginia— seemed a bit awkward as well. Google Images came to my rescue. Thanks to this picture, I realized that Moreno had read the French translation by André Morellet; the title —Observations sur la Virginie— matched Moreno's own Spanish translation. For once, it was Google Images, rather than Google Books, that provided the answers I was looking for. Still, the book was not digitized.
Then I came across this excellent article by Gordon S. Barker: "Unraveling the Strange History of Jefferson's Observations sur la Virginie", The Virginia Magazine of History and Biography, 2004. By then, all doubts had been cleared. Thinking that the original title was too humble, Morellet replaced it with Observations. And just has he had done ten years before with Beccaria's Dei delitti e delle pene, he took the book apart. (Interestingly enough, he has very little to say about the episode in his Mémoires: I, xv, p. 295).
Moreno's translation seemed to make perfect sense by now. But it was only in Paris, at Bibliothèque Nationale, that I was able to read a microfilm version of Observations sur la Virginie. There are still many twists in this story, some of which are relevant in terms of my research work on Mariano Moreno (an avid reader of Histoire des deux Indes). The good news is that Google Books has now digitized Morellet's translation.
The date is incorrect: the book was published in early 1787. You can find the part on Raynal and the degeneracy controversy in pages 161 to 165. Because the footnotes have been taken back into the main body ot the text, the reference to the 1780 edition of Histoire des deux Indes becomes more visible in translation. Thus, thanks to Morellet's tricks, Jefferson's criticism of Raynal is rendered in (slightly) less harsh terms.
(*) Agustín Mackinlay. El Enigma de Mariano Moreno. Fundación y Equilibrio de Poderes en la Era de las Revoluciones. Buenos Aires: R & C, 2009.
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AM | @HDI1780
While working in Amsterdam on my book on Mariano Moreno, back in 2008, I made the decision to leave the "Jefferson and Moreno" chapter to the last minute (*). I was brimming with confidence; after all, I had read most of the Notes on the State of Virginia (the book quoted by Moreno in Gazeta de Buenos-Ayres, 28 November 1810), and the library of the Universiteit van Amsterdam had plenty of resources. But as soon as I started with the chapter, I realized that things were more complex than I had anticipated.
The passage quoted by Moreno —on the 'federal' structure of Indian tribes— was absent from the main part of the Notes. And the title —Observaciones sobre la Virginia— seemed a bit awkward as well. Google Images came to my rescue. Thanks to this picture, I realized that Moreno had read the French translation by André Morellet; the title —Observations sur la Virginie— matched Moreno's own Spanish translation. For once, it was Google Images, rather than Google Books, that provided the answers I was looking for. Still, the book was not digitized.
Then I came across this excellent article by Gordon S. Barker: "Unraveling the Strange History of Jefferson's Observations sur la Virginie", The Virginia Magazine of History and Biography, 2004. By then, all doubts had been cleared. Thinking that the original title was too humble, Morellet replaced it with Observations. And just has he had done ten years before with Beccaria's Dei delitti e delle pene, he took the book apart. (Interestingly enough, he has very little to say about the episode in his Mémoires: I, xv, p. 295).
OBSERVATIONS
SUR
LA VIRGINIE
PAR M. J***
TRADUITES DE L'ANGLOIS
A PARIS
Chez BARROIS, l'aîné, Libraire, rue du
SUR
LA VIRGINIE
PAR M. J***
TRADUITES DE L'ANGLOIS
A PARIS
Chez BARROIS, l'aîné, Libraire, rue du
Hurepoix, près le pont Saint-Michel
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1786
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1786
Moreno's translation seemed to make perfect sense by now. But it was only in Paris, at Bibliothèque Nationale, that I was able to read a microfilm version of Observations sur la Virginie. There are still many twists in this story, some of which are relevant in terms of my research work on Mariano Moreno (an avid reader of Histoire des deux Indes). The good news is that Google Books has now digitized Morellet's translation.
The date is incorrect: the book was published in early 1787. You can find the part on Raynal and the degeneracy controversy in pages 161 to 165. Because the footnotes have been taken back into the main body ot the text, the reference to the 1780 edition of Histoire des deux Indes becomes more visible in translation. Thus, thanks to Morellet's tricks, Jefferson's criticism of Raynal is rendered in (slightly) less harsh terms.
(*) Agustín Mackinlay. El Enigma de Mariano Moreno. Fundación y Equilibrio de Poderes en la Era de las Revoluciones. Buenos Aires: R & C, 2009.
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Monday, April 9, 2012
JEFFERSON & RAYNAL (PART II)
"It is civilization alone which replaces women in the enjoyment of their natural equality" — Jefferson
AM | @HDI1780
- Women in Indian tribes. Although more work needs to be done, it is pretty clear in my mind that Jefferson took his inspiration from Histoire des deux Indes in his treatment of the condition of women in North American Indian tribes. Raynal: "Les femmes etoient sous l'oppression dans l'Orenoque, comme dans toutes les régions barbares" (HDI 1780, vii.17, p. 181). Jefferson: "The women are submitted to unjust drudgery. This I believe is the case with every barbarous people" (Notes on the State of Virginia, Query XVIII).
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- The earth belongs exclusively to the living (*). Here's another well-known tirade by Jefferson, almost certainly derived from Diderot's chapter 42 of Book XVIII in Histoire des deux Indes [see]. In his letter IV to Le politique hollandais (22 January 1782), Adams quotes in French the key passage from Révolution de l'Amérique: "Qu'il n'est nulle forme de gouvernement, dont la prérogative soit d' être immutable. Nulle autorité politique qui créée hier ou il y a mille ans, ne puisse être abrogée dans dix ans ou demain. Nulle puissance, si respectable, si sacrée qu'elle soit, autorisée à regarder l'État comme sa propriété" (pp. 42-43).
(*) Jefferson to Monroe, Paris, September 6, 1789 [see].
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- Letter to Chastellux. On 7 June 1785, Jefferson complains about Raynal in a letter to Marquis de Chastellux. Whereas John Adams had chosen to ignore the degeneracy controversy, Jefferson was deeply involved in (sometimes costly) refutations of Buffon, de Pauw and Raynal [VIDEO]. In particular, the author of Histoire des deux Indes draws his ire: "The Abbé Raynal alone has taken that step [i.e. extending degeneracy to Europeans transplanted to America]".
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- Article "États-Unis". In 1786, Jean Nicolas Démeunier published the long "États-Unis" article in Volume II of the Encyclopédie méthodique [see: pp. 345-433]. Jefferson did provide some information. Clearly, he was anxious to distance himself from Démeunier's text,"tainted" as it was from Histoire des deux Indes. Here's Jefferson in two August 1786 letters (*):
To Charles Gysbert, August 25: With respect to the article "Etats Unis" of the Encyclopedie now inclosed, I am far from making myself responsible for the whole of the article. The two first sections are taken chiefly from the Abbé Raynal & they are therefore wrong exactly in that proportion. To John Adams, August 27: I include you the article "Etats Unis" of one of the volumes of the Encyclopedie, lately published [...] He [Démeunier] has left a great deal of Abbé Raynal, that is to say a great deal of falsehood, and he has stated other things on bad information.
Jefferson's personal animosity notwithstanding, these documents show the extent of the damage created by the degeneracy controversy in terms of Raynal's reputation and the standing of Histoire des deux Indes in the New World.
(*) The Works of Thomas Jefferson, Vol. 5, pp. 161 and 171.
[PART III TOMORROW...]
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AM | @HDI1780
- Women in Indian tribes. Although more work needs to be done, it is pretty clear in my mind that Jefferson took his inspiration from Histoire des deux Indes in his treatment of the condition of women in North American Indian tribes. Raynal: "Les femmes etoient sous l'oppression dans l'Orenoque, comme dans toutes les régions barbares" (HDI 1780, vii.17, p. 181). Jefferson: "The women are submitted to unjust drudgery. This I believe is the case with every barbarous people" (Notes on the State of Virginia, Query XVIII).
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- The earth belongs exclusively to the living (*). Here's another well-known tirade by Jefferson, almost certainly derived from Diderot's chapter 42 of Book XVIII in Histoire des deux Indes [see]. In his letter IV to Le politique hollandais (22 January 1782), Adams quotes in French the key passage from Révolution de l'Amérique: "Qu'il n'est nulle forme de gouvernement, dont la prérogative soit d' être immutable. Nulle autorité politique qui créée hier ou il y a mille ans, ne puisse être abrogée dans dix ans ou demain. Nulle puissance, si respectable, si sacrée qu'elle soit, autorisée à regarder l'État comme sa propriété" (pp. 42-43).
(*) Jefferson to Monroe, Paris, September 6, 1789 [see].
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- Letter to Chastellux. On 7 June 1785, Jefferson complains about Raynal in a letter to Marquis de Chastellux. Whereas John Adams had chosen to ignore the degeneracy controversy, Jefferson was deeply involved in (sometimes costly) refutations of Buffon, de Pauw and Raynal [VIDEO]. In particular, the author of Histoire des deux Indes draws his ire: "The Abbé Raynal alone has taken that step [i.e. extending degeneracy to Europeans transplanted to America]".
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- Article "États-Unis". In 1786, Jean Nicolas Démeunier published the long "États-Unis" article in Volume II of the Encyclopédie méthodique [see: pp. 345-433]. Jefferson did provide some information. Clearly, he was anxious to distance himself from Démeunier's text,"tainted" as it was from Histoire des deux Indes. Here's Jefferson in two August 1786 letters (*):
To Charles Gysbert, August 25: With respect to the article "Etats Unis" of the Encyclopedie now inclosed, I am far from making myself responsible for the whole of the article. The two first sections are taken chiefly from the Abbé Raynal & they are therefore wrong exactly in that proportion. To John Adams, August 27: I include you the article "Etats Unis" of one of the volumes of the Encyclopedie, lately published [...] He [Démeunier] has left a great deal of Abbé Raynal, that is to say a great deal of falsehood, and he has stated other things on bad information.
Jefferson's personal animosity notwithstanding, these documents show the extent of the damage created by the degeneracy controversy in terms of Raynal's reputation and the standing of Histoire des deux Indes in the New World.
(*) The Works of Thomas Jefferson, Vol. 5, pp. 161 and 171.
[PART III TOMORROW...]
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Thursday, April 5, 2012
RAYNAL AND JEFFERSON (I)
"L'enthousiasme seul auroit pu surmonter ces difficultés" — Raynal
AM | @HDI1780
- They never met. To the best of my knowledge, Raynal and Jefferson never met. When the American envoy arrived in Paris in early August 1784, Guillaume-Thomas Raynal had just returned to France after his exile. But the author of Histoire des deux Indes was barred from sejourning in the French capital. By the time Raynal returned to Paris to present his famous Adresse à l'Assemblée Nationale (may 1791), Jefferson was already working in New York City as the first US Secretary of State. [Gilles Bancarel. Raynal ou le devoir de vérité. Paris: Honoré Champion, 2004; Jefferson in Paris: 1784-1789].
- Jefferson (cordially) detested Raynal. There is little doubt in my mind that Jefferson had a profound dislike for abbé Raynal. The reason may well be the fact that Histoire des deux Indes does not count him among the founders of the new republic: besides "leur chef, Wasington" (sic), Diderot cites "Hancok (sic), Franklin, les deux Adams" as "les plus grands acteurs dans cette scène intéressante". This is all the more remarkable since Diderot does provide a partial translation of the Declaration of Independence, which he labels the Revolution's "manifeste". [HDI 1780, xviii].
- The degeneracy controversy I. In Query VI of his Notes on the State of Virginia, Jefferson slams the notion that America and all things American tend to degenerate on account of the prevailing humidity in the New World. His specific target is Raynal, who ventured to apply the theory of degeneracy to descendants of Europeans themselves (*). Note that Jefferson cites Volume 7 of the 1774 Maastricht edition of HDI. In other words: he is deliberately omitting the 1780 edition which, thanks to Franklin's persuasion, proved much more benign in terms America's supposed degeneracy.
- The degeneracy controversy II. Only in footnote 15 does Jefferson acknowledge the 1780 edition of Histoire des deux Indes. Still, the tone is pretty harsh: "In a later edition of the Abbé Raynal's work, he has withdrawn his censure from that part of the new world inhabited by the Federo-Americans; but has left it still on the other parts. North America has always been more accessible to strangers than South. If he was mistaken then as to the former, he may be so as to the latter." Here's the main part on Raynal:
So far the Count de Buffon has carried this new theory of the tendency of nature to belittle her productions on this side the Atlantic. Its application to the race of whites transplanted from Europe, remained for the Abbe Raynal. "On doit etre etonne (he says) que Amerique n'ait pas encore produit un bon poete, un habile mathematicien, un homme de genie dans un seul art, ou seule science." (7. Hist. Philos. p. 92, ed. Maestricht, 1774.) "America has not yet produced one good poet." When we shall have existed as a people as long as the Greeks did before they produced a Homer, the Romans a Virgil, the French a Racine and Voltaire, the English a Shakespeare and Milton, should this reproach be still true, we will inquire from what unfriendly causes it has proceeded, that the other countries of Europe and quarters of the earth shall not have inscribed any name in the roll of poets. But neither has America produced "one able mathematician, one man of genius in a single art or a single science."
In war we have produced a Washington, whose memory will be adored while liberty shall have votaries, whose name shall triumph over time, and will in future ages assume its just station among the most celebrated worthies of the world, when that wretched philosophy shall be forgotten which would have arranged him among the degeneracies of nature. In physics we have produced a Franklin, than whom no one of the present age has made more important discoveries, nor has enriched philosophy with more, or more ingenious solutions of the phenomena of nature. We have supposed Mr. Rittenhouse second to no astronomer living; that in genius he must be the first, because he is self-taught. As an artist he has exhibited as great a proof of mechanical genius as the world has ever produced. He has not indeed made a world; but he has by imitation approached nearer its Maker than any man who has lived from the creation to this day.
As in philosophy and war, so in government, in oratory, in painting, in the plastic art, we might show that America, though but a child of yesterday, has already given hopeful proofs of genius, as well as of the nobler kinds, which arouse the best feelings of man, which call him into action, which substantiate his freedom, and conduct him to happiness, as of the subordinate, which serve to amuse him only. We therefore suppose, that this reproach is as unjust as it is unkind: and that, of the geniuses which adorn the present age, America contributes its full share. For comparing it with those countries where genius is most cultivated, where are the most excellent models for art, and scaffoldings for the attainment of science, as France and England for instance, we calculate thus: The United States contains three millions of inhabitants; France twenty millions; and the British islands ten.
We produce a Washington, a Franklin, a Rittenhouse. France than should have half a dozen in each of these lines, and great Britain half that number, equally eminent. It may be true that France has; we are but just becoming acquainted with her, and our acquaintance so far gives us high ideas of the genius of her inhabitants. It would be injuring too many of them to name particularly a Voltaire, a Buffon, the constellation of Encyclopedists, the Abbe Raynal himself, We therefore have reason to believe she can produce her full quota of genius. The present war having so long cut off all communication with Great Britain, we are not able to make a fair estimate of the state of science in that country. The spirit in which she wages war, is the only sample before our eyes, and that does not seem the legitimate offspring either of science or of civilization.
The sun of her glory is fast descending to the horizon. Her philosophy has crossed the Channel, her freedom the Atlantic, and herself seems passing to that awful dissolution whose issue is not given human foresight to scan....
(*) See my take on the degeneracy controversy in chapter 9 of El 'best-seller' que cambió el mundo.
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"L'enthousiasme seul auroit pu surmonter ces difficultés" — Raynal
AM | @HDI1780
- They never met. To the best of my knowledge, Raynal and Jefferson never met. When the American envoy arrived in Paris in early August 1784, Guillaume-Thomas Raynal had just returned to France after his exile. But the author of Histoire des deux Indes was barred from sejourning in the French capital. By the time Raynal returned to Paris to present his famous Adresse à l'Assemblée Nationale (may 1791), Jefferson was already working in New York City as the first US Secretary of State. [Gilles Bancarel. Raynal ou le devoir de vérité. Paris: Honoré Champion, 2004; Jefferson in Paris: 1784-1789].
- Jefferson (cordially) detested Raynal. There is little doubt in my mind that Jefferson had a profound dislike for abbé Raynal. The reason may well be the fact that Histoire des deux Indes does not count him among the founders of the new republic: besides "leur chef, Wasington" (sic), Diderot cites "Hancok (sic), Franklin, les deux Adams" as "les plus grands acteurs dans cette scène intéressante". This is all the more remarkable since Diderot does provide a partial translation of the Declaration of Independence, which he labels the Revolution's "manifeste". [HDI 1780, xviii].
- The degeneracy controversy I. In Query VI of his Notes on the State of Virginia, Jefferson slams the notion that America and all things American tend to degenerate on account of the prevailing humidity in the New World. His specific target is Raynal, who ventured to apply the theory of degeneracy to descendants of Europeans themselves (*). Note that Jefferson cites Volume 7 of the 1774 Maastricht edition of HDI. In other words: he is deliberately omitting the 1780 edition which, thanks to Franklin's persuasion, proved much more benign in terms America's supposed degeneracy.
- The degeneracy controversy II. Only in footnote 15 does Jefferson acknowledge the 1780 edition of Histoire des deux Indes. Still, the tone is pretty harsh: "In a later edition of the Abbé Raynal's work, he has withdrawn his censure from that part of the new world inhabited by the Federo-Americans; but has left it still on the other parts. North America has always been more accessible to strangers than South. If he was mistaken then as to the former, he may be so as to the latter." Here's the main part on Raynal:
So far the Count de Buffon has carried this new theory of the tendency of nature to belittle her productions on this side the Atlantic. Its application to the race of whites transplanted from Europe, remained for the Abbe Raynal. "On doit etre etonne (he says) que Amerique n'ait pas encore produit un bon poete, un habile mathematicien, un homme de genie dans un seul art, ou seule science." (7. Hist. Philos. p. 92, ed. Maestricht, 1774.) "America has not yet produced one good poet." When we shall have existed as a people as long as the Greeks did before they produced a Homer, the Romans a Virgil, the French a Racine and Voltaire, the English a Shakespeare and Milton, should this reproach be still true, we will inquire from what unfriendly causes it has proceeded, that the other countries of Europe and quarters of the earth shall not have inscribed any name in the roll of poets. But neither has America produced "one able mathematician, one man of genius in a single art or a single science."
In war we have produced a Washington, whose memory will be adored while liberty shall have votaries, whose name shall triumph over time, and will in future ages assume its just station among the most celebrated worthies of the world, when that wretched philosophy shall be forgotten which would have arranged him among the degeneracies of nature. In physics we have produced a Franklin, than whom no one of the present age has made more important discoveries, nor has enriched philosophy with more, or more ingenious solutions of the phenomena of nature. We have supposed Mr. Rittenhouse second to no astronomer living; that in genius he must be the first, because he is self-taught. As an artist he has exhibited as great a proof of mechanical genius as the world has ever produced. He has not indeed made a world; but he has by imitation approached nearer its Maker than any man who has lived from the creation to this day.
As in philosophy and war, so in government, in oratory, in painting, in the plastic art, we might show that America, though but a child of yesterday, has already given hopeful proofs of genius, as well as of the nobler kinds, which arouse the best feelings of man, which call him into action, which substantiate his freedom, and conduct him to happiness, as of the subordinate, which serve to amuse him only. We therefore suppose, that this reproach is as unjust as it is unkind: and that, of the geniuses which adorn the present age, America contributes its full share. For comparing it with those countries where genius is most cultivated, where are the most excellent models for art, and scaffoldings for the attainment of science, as France and England for instance, we calculate thus: The United States contains three millions of inhabitants; France twenty millions; and the British islands ten.
We produce a Washington, a Franklin, a Rittenhouse. France than should have half a dozen in each of these lines, and great Britain half that number, equally eminent. It may be true that France has; we are but just becoming acquainted with her, and our acquaintance so far gives us high ideas of the genius of her inhabitants. It would be injuring too many of them to name particularly a Voltaire, a Buffon, the constellation of Encyclopedists, the Abbe Raynal himself, We therefore have reason to believe she can produce her full quota of genius. The present war having so long cut off all communication with Great Britain, we are not able to make a fair estimate of the state of science in that country. The spirit in which she wages war, is the only sample before our eyes, and that does not seem the legitimate offspring either of science or of civilization.
The sun of her glory is fast descending to the horizon. Her philosophy has crossed the Channel, her freedom the Atlantic, and herself seems passing to that awful dissolution whose issue is not given human foresight to scan....
(*) See my take on the degeneracy controversy in chapter 9 of El 'best-seller' que cambió el mundo.
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Tuesday, April 3, 2012
SÛRETÉ & SÉCURITÉ DANS L'HISTOIRE DES DEUX INDES
"Dans une région où le numéraire manque, il faut vendre à crédit" — Raynal
AM | @HDI1780
Pour bien comprendre l'économie politique de l'Histoire des deux Indes, rien de mieux qu'un long séjour dans les pays émergents. C'est là qu'on saisit mieux l'importance de la sécurité personnelle. Lorsqu'on peut être arrêté sans le moindre élément d'enquête sérieux (Chine); lorsqu'il existe "un risque accru d’infractions violentes et d’enlèvement" (Venezuela); lorsqu'un ministre-visir décrète du jour au lendemain la confiscation de vos épargnes (Argentine); dans tous ces cas, le sens du mot despotisme devient très clair.
C'est précisement ce qui fait l'intérêt de l'économie politique au XVIIIe siècle. De Montesquieu à Necker, en passant par Galiani et Adam Smith, l'économie politique est organiquement liée à l'évolution des lois et des institutions. (Elle ne le sera plus au siècle suivant). Mis à part l'Angleterre et la Hollande, le monde est gouverné de façon plus ou moins "despotique"; ceci explique l'importance décernée par les économistes à la sécurité personnelle, sans laquelle il n'y a ni crédit, ni commerce, ni innovation. Voici quelques exemples tirés de l'Histoire des deux Indes:
- La sécurité avec laquelle on est toujours assez riche; la sécurité sans laquelle on ne l’est jamais assez... & c’est sincérement que vous ne vous croyez pas en sûreté. (HDI 1780, xii.14).
- Alors le corps législatif fit une loi qui assuroit à tous les émigrans François l’avantage de jouir avec sécurité de toutes les richesses qu’ils porteroient à la Dominique. (HDI 1780, xiv.40).
- "Tu avois des magistrats honnêtes & vertueux qui veilloient le jour à ton bonheur, la nuit à ta sécurité, pendant tous le cours de l’année à tes intérêts..." (HDI 1780, xvi.11).
- C’est sur cette perspective, que les Pensilvains ont fondé leur sécurité future. (HDI 1780, xviii.6).
- Rien ne contribue à cette union, comme une certaine égalité d’aisance; comme la sécurité qui naît de la propriété... (HDI 1780, xviii.24).
- Que la misanthropie exagère, tant qu’il lui plaira, les vices de nos cités, elle ne réussira pas à nous dégoûter de ces conventions expresses ou tacites, & de ces vertus artificielles qui font la sécurité & le charme de nos sociétés. (HDI 1780, xix.10).
- Il faut qu’elle [la contribution] soit permanente & toujours égale, sans quoi plus de sécurité pour vos personnes, vos propriétés, votre industrie. (HDI 1780, xix.10).
- La nation Angloise qui, mettant sa sûreté, sa puissance & sa gloire dans le commerce, avoit souffert impatiemment de voir réprimer ses usurpations... (HDI 1780, x.13).
- Ceux qui attaquent la propriété; vous ne laissez pas à votre esclave celle de sa personne: ceux qui détruisent la sûreté; vous pouvez l’immoler à vos caprices: ceux qui font frémir la pudeur...(HDI 1780, xi.24).
- ...faites prospérer la terre sur laquelle vous marchez, vous vivez; ou si l’autre hémisphère vous offre plus de puissance, de force, de sûreté, de bonheur, allez vous y établir... (HDI 1780, xiii.1).
- La législation y réussira, en faisant dans la forme des milices, tous les changemens qui peuvent se concilier avec la police & la sûreté qu’elles doivent avoir pour objet. (HDI 1780, xiii.52).
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"Dans une région où le numéraire manque, il faut vendre à crédit" — Raynal
AM | @HDI1780
Pour bien comprendre l'économie politique de l'Histoire des deux Indes, rien de mieux qu'un long séjour dans les pays émergents. C'est là qu'on saisit mieux l'importance de la sécurité personnelle. Lorsqu'on peut être arrêté sans le moindre élément d'enquête sérieux (Chine); lorsqu'il existe "un risque accru d’infractions violentes et d’enlèvement" (Venezuela); lorsqu'un ministre-visir décrète du jour au lendemain la confiscation de vos épargnes (Argentine); dans tous ces cas, le sens du mot despotisme devient très clair.
C'est précisement ce qui fait l'intérêt de l'économie politique au XVIIIe siècle. De Montesquieu à Necker, en passant par Galiani et Adam Smith, l'économie politique est organiquement liée à l'évolution des lois et des institutions. (Elle ne le sera plus au siècle suivant). Mis à part l'Angleterre et la Hollande, le monde est gouverné de façon plus ou moins "despotique"; ceci explique l'importance décernée par les économistes à la sécurité personnelle, sans laquelle il n'y a ni crédit, ni commerce, ni innovation. Voici quelques exemples tirés de l'Histoire des deux Indes:
- La sécurité avec laquelle on est toujours assez riche; la sécurité sans laquelle on ne l’est jamais assez... & c’est sincérement que vous ne vous croyez pas en sûreté. (HDI 1780, xii.14).
- Alors le corps législatif fit une loi qui assuroit à tous les émigrans François l’avantage de jouir avec sécurité de toutes les richesses qu’ils porteroient à la Dominique. (HDI 1780, xiv.40).
- "Tu avois des magistrats honnêtes & vertueux qui veilloient le jour à ton bonheur, la nuit à ta sécurité, pendant tous le cours de l’année à tes intérêts..." (HDI 1780, xvi.11).
- C’est sur cette perspective, que les Pensilvains ont fondé leur sécurité future. (HDI 1780, xviii.6).
- Rien ne contribue à cette union, comme une certaine égalité d’aisance; comme la sécurité qui naît de la propriété... (HDI 1780, xviii.24).
- Que la misanthropie exagère, tant qu’il lui plaira, les vices de nos cités, elle ne réussira pas à nous dégoûter de ces conventions expresses ou tacites, & de ces vertus artificielles qui font la sécurité & le charme de nos sociétés. (HDI 1780, xix.10).
- Il faut qu’elle [la contribution] soit permanente & toujours égale, sans quoi plus de sécurité pour vos personnes, vos propriétés, votre industrie. (HDI 1780, xix.10).
- La nation Angloise qui, mettant sa sûreté, sa puissance & sa gloire dans le commerce, avoit souffert impatiemment de voir réprimer ses usurpations... (HDI 1780, x.13).
- Ceux qui attaquent la propriété; vous ne laissez pas à votre esclave celle de sa personne: ceux qui détruisent la sûreté; vous pouvez l’immoler à vos caprices: ceux qui font frémir la pudeur...(HDI 1780, xi.24).
- ...faites prospérer la terre sur laquelle vous marchez, vous vivez; ou si l’autre hémisphère vous offre plus de puissance, de force, de sûreté, de bonheur, allez vous y établir... (HDI 1780, xiii.1).
- La législation y réussira, en faisant dans la forme des milices, tous les changemens qui peuvent se concilier avec la police & la sûreté qu’elles doivent avoir pour objet. (HDI 1780, xiii.52).
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Monday, April 2, 2012
"Il faut des passions aux hommes" — Helvétius
AM | @HDI1780
Jean-Baptiste Demanet. Jean-Baptiste Demanet's Nouvelle Histoire de l'Afrique françoise (1767), says Ann Thomson, is a source used by Raynal in book XI of HDI [see]. I have found a link to the second volume. "L'Africain paroît être une machine", writes Demanet. In book XIII of HDI 1770, in his discussion of credit markets, Raynal depicts African slaves as "des machines". The tone changes dramatically in 1780, where such references are completely absent (at least in book XIII).
[Abbé Demanet. Nouvelle histoire de l'Afrique françoise, Tome II. Paris: Duchesne, Lacombe, 1767].
* * *
Tom Paine. Je poursuis mes recherches sur la lettre de "Un Ciudadano" (1, 2, 3). Tout porte à croire que Gregorio Funes (ou Mariano Moreno) utilise la "Lettre adressée à l’abbé Raynal sur les affaires de l’Amérique Septentrionale" de Tom Paine. Encore une pièce à ajouter au dossier de la Révolution d'Amérique et son importance par rapport aux évènements du Río de la Plata en 1810...
[Recueil de diverses pièces, servant de supplément à l’Histoire philosophique et politique des établissemens et du commerce des Européens dans les deux Indes par Guillaume-Thomas Raynal. Neuchatel: 1784].
* * *
Er sagt den Köningen die Wahrheit. Il y a tout juste deux-cent trente ans, Raynal rencontrait Goethe à Weimar. C'est de là que le poète allemand écrivait à Karl Ludwig von Knebel à propos de Raynal, le 5 mai 1782: "Er sagt den Königen die Wahrheit und schmeichelt den Frauen". "Il dit la vérité aux rois": sans doute avait-il en tête les textes que l'Histoire des deux Indes dédie à Frédéric II, à Louis XVI et à Catherine II, textes rédigés par ... Diderot.
[Hans Joachim Schmitt: "Neues zum Deutschlandaufenthalt des Abbé Raynal im Jahre 1782", Zeitschrift des Vereins für hessische Geschichte (ZHG) Band 106, 2001, S. 51-58 (pdf)].
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Saturday, March 31, 2012
WE'RE ON TWITTER!
AM | @HDI1780
It's official: Histoire des deux Indes is on Twitter! Here's the handle: @HDI1780. I'll be posting lots of quotations, book reviews and links to Google Books, Gallica and other resources. The Twitter account should take us to another level in terms of connectivity.
And, by the way, I'm pretty sure that both Diderot and Raynal would have nodded in agreement.
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Monday, March 26, 2012
LES LUMIÈRES RADICALES @ RÍO DE LA PLATA, III
"Tout acte d'un pouvoir arbitraire est injuste" — Helvétius
AM | @HDI1780
Je présente aujourd'hui la troisième partie de mon analyse —à l'aide de techniques dites de "Humanities 2.0" — de l'article de "Un Ciudadano", publié le 20 novembre 1810 dans la Gazeta Extraordinaria de Buenos-Ayres, en pleine révolution du Río de la Plata (voir: 1, 2). L'auteur de l'Histoire des deux Indes est présenté comme "un sábio filosofo"; cependant, Moreno (ou Funes) ne le mentionne jamais de façon explicite. A noter également la présence d'un morceau tiré de la Correspondance littéraire de Grimm.
Ce n'est pas la première fois: nous en avons noté des traces dans d'autres textes de Moreno. Cela pose pourtant un problème. Les écrits de Moreno datent au plus tard de 1810 (il mourra début 1811). Or, la Correspondance n'est publiée qu'après 1813. Ils est donc clair que ces textes circulaient bien avant. Quant à la référence aux "vertueux incas" de Raynal, elle provient du Livre VI de l'édition de 1774 de l'HDI. Il me semble que ce passage ne figure pas dans le texte de 1780. Affaire à suivre...
Sobre estas máximas ha procedido la corte de España, como para afirmar el concepto público á favor de su ilimitada autoridad [1]. Todo se ha puesto en práctica, á fin de persuadirnos que sus Monarcas casi eran de otra especie de la nuestra, y que sus caprichos llevaban siempre el sublime carácter de la ley.
La nación española sacrificada ella misma al despotismo [2], se iba interesando tambien en que la América lo fuese, para engrasare con sus bienes, y resarcir sus depredaciones [3]. Los virreyes fastuosos [4], que como dice un sábio filósofo [5], enervados por la codicia, y los placeres han dormido insolentemente sobre las cenizas de los virtuosos incas [6], forzoso era que sin inquietarse por la felicidad del estado [7], solo exigiesen una obediencia ciega [8], que les ganase partido en la estimacion del comun dueño [9].
Las Audiencias lejos de velar sobre las costumbres, y ser los oráculos de la verdad [10], no han hecho mas que multiplicar á nuestros ojos [11] exemplos de rapiña [12], y de injusticia [13], que contrastan enormemente con las lecciones de providad [14], que debian dar. ¿Qué otra cosa les convenía, sino sofocar el grito de la razon [15], y dar en su conducta antojadiza una expresion enérgica del poder que representaban? Los gobernadores de la provincia creían haber hecho lo bastante por los pueblos, miéntras los veian soportar el yugo con impaciencia [16], y tomaban esta sumision por una prueba de su felicidad [17].
¿Será extraño que afianzada asi la opinion pública se nos haya pedido para los príncipes un culto casi igual que á la divinidad? Bien ha podido la razon algunas veces reclamar sus derechos á favor nuestro, y señalarnos en ellos con el dedo los opresores de los pueblos [18]: ninguno ha sido tan osado, que no saliese huyendo de sí mismo, á fín de no ser cómplice de su imaginación [19]. Sr Editor, demos gracias al Dios vengador [20] de sus hechuras, porque ha querido ponernos en estado de que una nueva constitucion enmiende sus agravios.
[1] ILIMITADA AUTORIDAD… CAPRICHOS. Raynal: “…soumise aux caprices, exposée aux vexations d’une autorité illimitée?” (HDI 1780, v.4, p. 32).
[2] SACRIFICADA ELLA MISMA AL DESPOTISMO. Abbé Bergier: “…celui-ci a sacrifié au despotisme des Rois…” (Encyclopédie Méthodique. Théologique, Tome 3. Paris: Panckoucke, 1790, p. 378).
[3] DEPREDACIONES. Raynal: “Les déprédations des Espagnols dans toute l’Amérique…” (HDI 1780, xix.1, p. 9). Texte d'Alexandre Deleyre, bien connu par Moreno.
[4] LOS VIRREYES FASTUOSOS. Voltaire: “Le vice-roi qui résidait à Goa égalait alors le Gran Mogol en magnificence & en faste…” (Essai sur les moeurs et l’esprit des nations, Vol. 3, Œuvres complètes de Voltaire, Tome 18. Imprimerie de la Société Littéraire-Typographique, 1784, p. 393).
[5] UN SÁBIO FILÓSOFO. C'est Raynal! Dans la Representación de los hacendados, Moreno le décrit comme “el más fecundo ingenio de nuestro siglo” (Moreno s'identifie pleinement avec le Siècle des Lumières). Dans la Gazeta de Buenos-Ayres du 16 septembre, Raynal devient “un filosofo moderno, cuyos talentos formarán siempre el asombro de la posteridad”.
[6] FASTUOSOS… ENERVADOS POR LA CODICIA Y LOS PLACERES HAN DORMIDO INSOLENTEMENTE SOBRE LAS CENIZAS DE LOS VIRTUOSOS INCAS. Raynal: “…la destinée a voulu que des moines bizarrement fastueux, énervés à la fois par la paresse & par la volupté, dormissent insolemment sur les cendres des vertueux incas…” (HDI 1774, vi.21, p. 207).
[7] LA FELICIDAD DEL ESTADO. Mably: “…instrument de la félicité de l’état…” (“La retraite de M. Necker”, Œuvres posthumes de l’abbé Mably, Tome 3. Paris: Desbriere: 1798, p. 132). Moreno a lu De la Révolution françoise (1796) de Necker.
[8] OBEDIENCIA CIEGA. Helvétius: “Nous n’exigeons point, dit s. Paul, une obéissance aveugle…” (De l’esprit, 1758, iv.10, p. 558); d’Holbach: “L’obéissance aveugle n’est faite que pour les esclaves.” (Politique naturelle, ou discours sur les vrais principes du gouvernement, Tome I, iv.3, Londres, 1773, p. 162). Raynal: “…énervées par l’habitude d’une obéissance aveugle…” (HDI 1780, vi, p. 394).
[9] COMUN DUEÑO. Helvétius: “Maître commun de tous les inventeurs” (De l’homme, 1773, Tome I, ii.24, p. 225).
[10] LOS ORACULOS DE LA VERDAD. Raynal: “…les prétendus oracles de la vérité.” (HDI 1780, xix.1, p. 11). Texte de Deleyre.
[11] MULTIPLICAR À NUESTROS OJOS. De Jaucourt: “…l’avantage de multiplier à nos yeux des objets uniques…”, article VERRE, Encyclopédie, Tome 17, 1765, p. 93).
[12] EXEMPLOS DE RAPIÑA. Voltaire: “…premier détestable exemple des rapines ecclésistiques.” Œuvres complètes de Voltaire, Tome 33. Imprimerie de la Société Littéraire-Typographique, 1784, p. 442).
[13] EXEMPLOS DE INJUSTICIA. Raynal: “…par un exemple de cette injustice…” (HDI 1780, vii.3, p. 9).
[14] LECCIONES DE PROVIDAD. Mirabeau: “…leur a donné une leçon de probité…” (Orgie et testament de Mirabeau, 1791, p. 30). C'est possible!
[15] SOFOCAR EL GRITO DE LA RAZÓN. Frédéric II: “…étouffer le cri de la raison, de la nature et de l’humanité.” Lettre de Frédéric II à Voltaire, septembre 1775, Œuvres complètes de Voltaire, Tome 87. Imprimerie de la Société Littéraire-Typographique, 1785, p. 202). Raynal: “La forcé de l’habitude, qui étouffe si souvent le cri de la raison…” (HDI 1780, viii.13, p. 297). Fragment sur le Paraguay.
[16] SOPORTAR EL YUGO CON IMPACIENCIA. Histoire Universelle: “…supporter avec impatience le joug des Cheiks Arabes.” (Histoire Universelle, Tome 24, xix.2. Amsterdam et Leipzig: 1745 , p. 109). Ce n'est pas la première apparition de l'Histoire Universelle. Helvétius: “Les gens vertueux, raisonnables, supportent impatiemment le joug du Despotisme.” (De l’homme, 1773, Tome II, vi.1, p. 78, note).
[17] PRUEBA DE SU FELICIDAD. Grimm: “…c’est la preuve du bonheur auquel nous étions destinés…” (“Pourquoi l’Homme ne nait pas, comme las Animaux, avec le degré de perfection qui lui en est propre?”, 1776, Correspondance littéraire, p. 419).
[18] OPRESORES DE LOS PUEBLOS. Helvétius: “Des hommes qui joignent á la qualité d’esclaves celle d’oppresseurs des Peuples.” (De l’homme, 1773, Tome 1, iv.16, note 54, p. 384).
[19] CÓMPLICE DE SU IMAGINACION. Claude Joseph Dorat à Voltaire, 1766: “Ne croyez pas cependant que mon coeur ait été, dans tout ceci, le complice de mon imagination…” Œuvres complètes de Voltaire, Tome 115. University of Toronto Press, 1974.
[20] DIOS VENGADOR. Montesquieu: “Qu’il trouve en tout lieu la présence d’un Dieu vengeur et les puissances célestes irritées!” (Discours au Parlement de Bordeaux, 1723; voir). Rousseau: “Le Dieu vengeur est le Dieu des méchans…” (Julie ou la Nouvelle Heloïse, Tome III, Amsterdam: 1769, p. 291). Condorcet: “…d’annoncer aux hommes un Dieu vengeur des crimes…” (“Vie de Voltaire”, Œuvres complètes de Condorcet, Tome 7. Paris: Henrichs, 1804, p. 63).
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"Tout acte d'un pouvoir arbitraire est injuste" — Helvétius
AM | @HDI1780
Je présente aujourd'hui la troisième partie de mon analyse —à l'aide de techniques dites de "Humanities 2.0" — de l'article de "Un Ciudadano", publié le 20 novembre 1810 dans la Gazeta Extraordinaria de Buenos-Ayres, en pleine révolution du Río de la Plata (voir: 1, 2). L'auteur de l'Histoire des deux Indes est présenté comme "un sábio filosofo"; cependant, Moreno (ou Funes) ne le mentionne jamais de façon explicite. A noter également la présence d'un morceau tiré de la Correspondance littéraire de Grimm.
Ce n'est pas la première fois: nous en avons noté des traces dans d'autres textes de Moreno. Cela pose pourtant un problème. Les écrits de Moreno datent au plus tard de 1810 (il mourra début 1811). Or, la Correspondance n'est publiée qu'après 1813. Ils est donc clair que ces textes circulaient bien avant. Quant à la référence aux "vertueux incas" de Raynal, elle provient du Livre VI de l'édition de 1774 de l'HDI. Il me semble que ce passage ne figure pas dans le texte de 1780. Affaire à suivre...
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Sobre estas máximas ha procedido la corte de España, como para afirmar el concepto público á favor de su ilimitada autoridad [1]. Todo se ha puesto en práctica, á fin de persuadirnos que sus Monarcas casi eran de otra especie de la nuestra, y que sus caprichos llevaban siempre el sublime carácter de la ley.
La nación española sacrificada ella misma al despotismo [2], se iba interesando tambien en que la América lo fuese, para engrasare con sus bienes, y resarcir sus depredaciones [3]. Los virreyes fastuosos [4], que como dice un sábio filósofo [5], enervados por la codicia, y los placeres han dormido insolentemente sobre las cenizas de los virtuosos incas [6], forzoso era que sin inquietarse por la felicidad del estado [7], solo exigiesen una obediencia ciega [8], que les ganase partido en la estimacion del comun dueño [9].
Las Audiencias lejos de velar sobre las costumbres, y ser los oráculos de la verdad [10], no han hecho mas que multiplicar á nuestros ojos [11] exemplos de rapiña [12], y de injusticia [13], que contrastan enormemente con las lecciones de providad [14], que debian dar. ¿Qué otra cosa les convenía, sino sofocar el grito de la razon [15], y dar en su conducta antojadiza una expresion enérgica del poder que representaban? Los gobernadores de la provincia creían haber hecho lo bastante por los pueblos, miéntras los veian soportar el yugo con impaciencia [16], y tomaban esta sumision por una prueba de su felicidad [17].
¿Será extraño que afianzada asi la opinion pública se nos haya pedido para los príncipes un culto casi igual que á la divinidad? Bien ha podido la razon algunas veces reclamar sus derechos á favor nuestro, y señalarnos en ellos con el dedo los opresores de los pueblos [18]: ninguno ha sido tan osado, que no saliese huyendo de sí mismo, á fín de no ser cómplice de su imaginación [19]. Sr Editor, demos gracias al Dios vengador [20] de sus hechuras, porque ha querido ponernos en estado de que una nueva constitucion enmiende sus agravios.
[1] ILIMITADA AUTORIDAD… CAPRICHOS. Raynal: “…soumise aux caprices, exposée aux vexations d’une autorité illimitée?” (HDI 1780, v.4, p. 32).
[2] SACRIFICADA ELLA MISMA AL DESPOTISMO. Abbé Bergier: “…celui-ci a sacrifié au despotisme des Rois…” (Encyclopédie Méthodique. Théologique, Tome 3. Paris: Panckoucke, 1790, p. 378).
[3] DEPREDACIONES. Raynal: “Les déprédations des Espagnols dans toute l’Amérique…” (HDI 1780, xix.1, p. 9). Texte d'Alexandre Deleyre, bien connu par Moreno.
[4] LOS VIRREYES FASTUOSOS. Voltaire: “Le vice-roi qui résidait à Goa égalait alors le Gran Mogol en magnificence & en faste…” (Essai sur les moeurs et l’esprit des nations, Vol. 3, Œuvres complètes de Voltaire, Tome 18. Imprimerie de la Société Littéraire-Typographique, 1784, p. 393).
[5] UN SÁBIO FILÓSOFO. C'est Raynal! Dans la Representación de los hacendados, Moreno le décrit comme “el más fecundo ingenio de nuestro siglo” (Moreno s'identifie pleinement avec le Siècle des Lumières). Dans la Gazeta de Buenos-Ayres du 16 septembre, Raynal devient “un filosofo moderno, cuyos talentos formarán siempre el asombro de la posteridad”.
[6] FASTUOSOS… ENERVADOS POR LA CODICIA Y LOS PLACERES HAN DORMIDO INSOLENTEMENTE SOBRE LAS CENIZAS DE LOS VIRTUOSOS INCAS. Raynal: “…la destinée a voulu que des moines bizarrement fastueux, énervés à la fois par la paresse & par la volupté, dormissent insolemment sur les cendres des vertueux incas…” (HDI 1774, vi.21, p. 207).
[7] LA FELICIDAD DEL ESTADO. Mably: “…instrument de la félicité de l’état…” (“La retraite de M. Necker”, Œuvres posthumes de l’abbé Mably, Tome 3. Paris: Desbriere: 1798, p. 132). Moreno a lu De la Révolution françoise (1796) de Necker.
[8] OBEDIENCIA CIEGA. Helvétius: “Nous n’exigeons point, dit s. Paul, une obéissance aveugle…” (De l’esprit, 1758, iv.10, p. 558); d’Holbach: “L’obéissance aveugle n’est faite que pour les esclaves.” (Politique naturelle, ou discours sur les vrais principes du gouvernement, Tome I, iv.3, Londres, 1773, p. 162). Raynal: “…énervées par l’habitude d’une obéissance aveugle…” (HDI 1780, vi, p. 394).
[9] COMUN DUEÑO. Helvétius: “Maître commun de tous les inventeurs” (De l’homme, 1773, Tome I, ii.24, p. 225).
[10] LOS ORACULOS DE LA VERDAD. Raynal: “…les prétendus oracles de la vérité.” (HDI 1780, xix.1, p. 11). Texte de Deleyre.
[11] MULTIPLICAR À NUESTROS OJOS. De Jaucourt: “…l’avantage de multiplier à nos yeux des objets uniques…”, article VERRE, Encyclopédie, Tome 17, 1765, p. 93).
[12] EXEMPLOS DE RAPIÑA. Voltaire: “…premier détestable exemple des rapines ecclésistiques.” Œuvres complètes de Voltaire, Tome 33. Imprimerie de la Société Littéraire-Typographique, 1784, p. 442).
[13] EXEMPLOS DE INJUSTICIA. Raynal: “…par un exemple de cette injustice…” (HDI 1780, vii.3, p. 9).
[14] LECCIONES DE PROVIDAD. Mirabeau: “…leur a donné une leçon de probité…” (Orgie et testament de Mirabeau, 1791, p. 30). C'est possible!
[15] SOFOCAR EL GRITO DE LA RAZÓN. Frédéric II: “…étouffer le cri de la raison, de la nature et de l’humanité.” Lettre de Frédéric II à Voltaire, septembre 1775, Œuvres complètes de Voltaire, Tome 87. Imprimerie de la Société Littéraire-Typographique, 1785, p. 202). Raynal: “La forcé de l’habitude, qui étouffe si souvent le cri de la raison…” (HDI 1780, viii.13, p. 297). Fragment sur le Paraguay.
[16] SOPORTAR EL YUGO CON IMPACIENCIA. Histoire Universelle: “…supporter avec impatience le joug des Cheiks Arabes.” (Histoire Universelle, Tome 24, xix.2. Amsterdam et Leipzig: 1745 , p. 109). Ce n'est pas la première apparition de l'Histoire Universelle. Helvétius: “Les gens vertueux, raisonnables, supportent impatiemment le joug du Despotisme.” (De l’homme, 1773, Tome II, vi.1, p. 78, note).
[17] PRUEBA DE SU FELICIDAD. Grimm: “…c’est la preuve du bonheur auquel nous étions destinés…” (“Pourquoi l’Homme ne nait pas, comme las Animaux, avec le degré de perfection qui lui en est propre?”, 1776, Correspondance littéraire, p. 419).
[18] OPRESORES DE LOS PUEBLOS. Helvétius: “Des hommes qui joignent á la qualité d’esclaves celle d’oppresseurs des Peuples.” (De l’homme, 1773, Tome 1, iv.16, note 54, p. 384).
[19] CÓMPLICE DE SU IMAGINACION. Claude Joseph Dorat à Voltaire, 1766: “Ne croyez pas cependant que mon coeur ait été, dans tout ceci, le complice de mon imagination…” Œuvres complètes de Voltaire, Tome 115. University of Toronto Press, 1974.
[20] DIOS VENGADOR. Montesquieu: “Qu’il trouve en tout lieu la présence d’un Dieu vengeur et les puissances célestes irritées!” (Discours au Parlement de Bordeaux, 1723; voir). Rousseau: “Le Dieu vengeur est le Dieu des méchans…” (Julie ou la Nouvelle Heloïse, Tome III, Amsterdam: 1769, p. 291). Condorcet: “…d’annoncer aux hommes un Dieu vengeur des crimes…” (“Vie de Voltaire”, Œuvres complètes de Condorcet, Tome 7. Paris: Henrichs, 1804, p. 63).
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Friday, March 16, 2012
"Les esprits se rassuroient à peine" — Raynal
AM | @HDI1780
In the wake of William the Conqueror's successful English campaign, notes Raynal, everything was thrown in a state of confusion, including property rights: "Malheureusement l'introduction du gouvernement féodal occasiona une révolution si brusque & si entière dans les propriétés, que tout tomba dans la confusion" (HDI 1780, iii.1, p. 263).
Without much explanation, he then states: "L’intérêt de l’argent étoit de cinquante pour cent". Although the point is never quite explicitely made, we are led to believe that the supply of credit tends to contract whenever property rights become unstable.
* * *
There is little doubt in my mind that Raynal debated these issues with Diderot. As a matter of fact, he inserts a long passage by Diderot on usury and the credit market, right after his statement on interest rates in eleventh-century England. In titre 95 of Observations sur le Nakaz, Diderot makes the same point: "...dans une contrée très éloignée, où il n'y a nul exercise des lois ... il y a risque de perdre ses avances." Yet it was Adam Smith who best explained the link between anarchy and usury:
Among the barbarous nations who overran the western provinces of the Roman empire, the performance of contracts was left for many ages to the faith of the contracting parties. The courts of justice of their kings seldom intermeddled in it. The high rate of interest which took place in those ancient times may perhaps be partly accounted for from this cause (Wealth of Nations, i.9).
When it comes to interest rates and the credit market, both Raynal and Diderot had a clear sense of (most of) the causal relations involved. Yet, they failed to present their arguments in a rigorous manner, like Adam Smith in 1776. Why? Because they lacked the Scotsman's esprit systématique.
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Thursday, March 15, 2012
DIDEROT & LES CONTRE-FORCES (II)
"Le supplice public d'un roi change l'esprit d'une nation pour jamais" — Diderot
AM | @HDI1780
Il y a tout juste un mois, j'avais fait référence au vocabulaire employé par Diderot au sujet de l'équilibre politique: contre-forces au lieu de contrepoids [voir]. Un exemple, tiré de sa diatribe contre le despotisme chinois, illustre nettement ce point de vue. Pour Diderot, il y a une seule façon de prouver que l'autorité souveraine est limitée, c'est-à-dire que le gouvernement n'est pas despotique: il faut voir, ou tout au moins avoir vu, les contre-forces en action. Voici le texte:
Mais l'autorité souveraine est limitée à la Chine ... Où ne l'est-elle pas? Comment, par qui est-elle limitée à la Chine? Si la barriere qui protège le peuple n'est pas hérissée de lances, d'épées, de bayonnettes dirigées vers la poitrine ou la tête sacrée de l'empereur pere & despote, nous craindrons, mal à propos peut-être, mais nous craindrons que cette barriere ne soit à la Chine qu'une grande toile d'araignée sur laquelle on auroit peint l'image de la justice & de la liberté, mais au travers de laquelle, l'homme qui a de bons yeux apperçoit la tête hideuse du despote. Y a-t-il eu un grand nombre de tyrans déposés, emprisonnés, jugés, mis à mort? Voit-on sur la place publique un échaffaud sans cesse dégouttant du sang des souverains? Pourquoi cela n'est-il pas? (HDI 1780, i.21, p. 151).
De façon indirecte, c'est l'histoire politique de l'Angleterre qui est évoquée ici. L'action violente des contre-forces revient dans deux morceaux de Diderot sur l'Angleterre. Au titre XXIV des Mélanges pour Catherine II, nous lisons: "Que ce tribunal [le Parlement] si utile qui a coûté des flots de sang à l'Angleterre..." Et voici HDI 1780, xviii.39, p. 203: "On vit l’Anglois, sous les Tudors, abandonner ses droits les plus précieux & livrer sa tête sans défense à la hache des tyrans: mais jamais renoncer au droit de s’imposer lui-même. C’est pour le défendre qu’il répandit des flots de sang, qu’il détrôna ou punit ses rois."
On comprend mieux, en relisant ces textes, pourquoi Diderot parle de contre-forces physiques, et pourquoi le dynamisme des "contre-forces" est préferé à l'inertie des "contrepoids".
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"Le supplice public d'un roi change l'esprit d'une nation pour jamais" — Diderot
AM | @HDI1780
Il y a tout juste un mois, j'avais fait référence au vocabulaire employé par Diderot au sujet de l'équilibre politique: contre-forces au lieu de contrepoids [voir]. Un exemple, tiré de sa diatribe contre le despotisme chinois, illustre nettement ce point de vue. Pour Diderot, il y a une seule façon de prouver que l'autorité souveraine est limitée, c'est-à-dire que le gouvernement n'est pas despotique: il faut voir, ou tout au moins avoir vu, les contre-forces en action. Voici le texte:
Mais l'autorité souveraine est limitée à la Chine ... Où ne l'est-elle pas? Comment, par qui est-elle limitée à la Chine? Si la barriere qui protège le peuple n'est pas hérissée de lances, d'épées, de bayonnettes dirigées vers la poitrine ou la tête sacrée de l'empereur pere & despote, nous craindrons, mal à propos peut-être, mais nous craindrons que cette barriere ne soit à la Chine qu'une grande toile d'araignée sur laquelle on auroit peint l'image de la justice & de la liberté, mais au travers de laquelle, l'homme qui a de bons yeux apperçoit la tête hideuse du despote. Y a-t-il eu un grand nombre de tyrans déposés, emprisonnés, jugés, mis à mort? Voit-on sur la place publique un échaffaud sans cesse dégouttant du sang des souverains? Pourquoi cela n'est-il pas? (HDI 1780, i.21, p. 151).
De façon indirecte, c'est l'histoire politique de l'Angleterre qui est évoquée ici. L'action violente des contre-forces revient dans deux morceaux de Diderot sur l'Angleterre. Au titre XXIV des Mélanges pour Catherine II, nous lisons: "Que ce tribunal [le Parlement] si utile qui a coûté des flots de sang à l'Angleterre..." Et voici HDI 1780, xviii.39, p. 203: "On vit l’Anglois, sous les Tudors, abandonner ses droits les plus précieux & livrer sa tête sans défense à la hache des tyrans: mais jamais renoncer au droit de s’imposer lui-même. C’est pour le défendre qu’il répandit des flots de sang, qu’il détrôna ou punit ses rois."
On comprend mieux, en relisant ces textes, pourquoi Diderot parle de contre-forces physiques, et pourquoi le dynamisme des "contre-forces" est préferé à l'inertie des "contrepoids".
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Wednesday, March 14, 2012
LA CHINE & 'L'ESPRIT D'INVENTION'
"Quel fruit espérer d'un exercice si contraire à la nature?" — Diderot
AM | @agumack
La lecture du Financial Times est pour moi un must; c'est une source d'information indispensable pour mes cours d'économie politique. Jamil Anderlini, journaliste à Shanghai, publie un très intéressant article sur les problèmes de la Chine en matière d'innovation. Le titre en dit long: "Autocratic directives fail to spark creativity" [1]. La censure, la lenteur d'internet (afin de mieux surveiller la population), la corruption, le manque de transparence: voilà autant de difficultés pour les innovateurs.
N'est-ce pas exactement ce qu'anticipait l'Histoire des deux Indes? Raynal se demande si la préoccupation pour la stabilité, endémique chez les chinois, ne va pas à l'encontre de l'esprit d'invention: "Un respect outré pour l'antiquité, les asservit à tout ce qui est établi. Toutes ces causes réunies ont dû ôtér aux Chinois l'esprit d'invention. Il leur faut des siècles pour inventer quelque chose" (HDI 1780, i.20, p. 143). Diderot va plus loin. D'emblée, il constate que le savoir abstrait y est mal vu, à cause de l'excès de population:
...c'est le peu de progrès des sciences & des arts, depuis l'époque très éloignée qu'on les y cultive. Les recherches s'y sont arrétées au point où, cessant d'être utiles, elles commencent à devenir curieuses. Il y a plus de profit à l'invention du plus petit art pratique, qu'à la plus sublime découverte qui ne montreroit que du génie. On fait plus de cas de celui qui sait tirer parti des recoupes de la gaze, que de celui qui résoudroit le problème des trois corps.
Puis il se déchaîne contre le despotisme chinois, la véritable cause du manque de "lumières" (HDI 1780, i.21). Les inconvénients se suivent et se ressemblent: failles du système éducatif et judiciaire ("...la connaissance de la langue est le dernier terme de la science... la justice est d'une vénalité sans exemple..."), manque d'honnêteté des commerçants, etc. Bref, les arguments de Voltaire et des physiocrates en faveur de la Chine le laisseront indifférent, à moins que:
...on nous apporte de Pekin des ouvrages de philosophie supérieurs à ceux de Descartes & de Locke; des traités de mathématique à placer à coté de ceux de Newton, de Leibnitz & de leurs successeurs; des morceaux de poésie, d'éloquence, de littérature & d'érudition que nos grands écrivains daignent lire, & dont ils soient forcés d'avouer la profondeur, la grace, le goût & la finesse; [...] des instruments de physique, des machines où notre infériorité soit bien démontrée [2].
[1] Financial Times, 26 octobre 2011.
[2] A propos des "machines", voici justement M. Anderlini: "...some top Chinese scientists were quick to dismiss the invention of Tianhe-1, the world's fastest supercomputer, as little more a than propaganda stunt and it soon emerged that almostall the chips used to build the machine were made by Intel and Nvidia, a US computer animation company".
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"Quel fruit espérer d'un exercice si contraire à la nature?" — Diderot
AM | @agumack
La lecture du Financial Times est pour moi un must; c'est une source d'information indispensable pour mes cours d'économie politique. Jamil Anderlini, journaliste à Shanghai, publie un très intéressant article sur les problèmes de la Chine en matière d'innovation. Le titre en dit long: "Autocratic directives fail to spark creativity" [1]. La censure, la lenteur d'internet (afin de mieux surveiller la population), la corruption, le manque de transparence: voilà autant de difficultés pour les innovateurs.
N'est-ce pas exactement ce qu'anticipait l'Histoire des deux Indes? Raynal se demande si la préoccupation pour la stabilité, endémique chez les chinois, ne va pas à l'encontre de l'esprit d'invention: "Un respect outré pour l'antiquité, les asservit à tout ce qui est établi. Toutes ces causes réunies ont dû ôtér aux Chinois l'esprit d'invention. Il leur faut des siècles pour inventer quelque chose" (HDI 1780, i.20, p. 143). Diderot va plus loin. D'emblée, il constate que le savoir abstrait y est mal vu, à cause de l'excès de population:
...c'est le peu de progrès des sciences & des arts, depuis l'époque très éloignée qu'on les y cultive. Les recherches s'y sont arrétées au point où, cessant d'être utiles, elles commencent à devenir curieuses. Il y a plus de profit à l'invention du plus petit art pratique, qu'à la plus sublime découverte qui ne montreroit que du génie. On fait plus de cas de celui qui sait tirer parti des recoupes de la gaze, que de celui qui résoudroit le problème des trois corps.
Puis il se déchaîne contre le despotisme chinois, la véritable cause du manque de "lumières" (HDI 1780, i.21). Les inconvénients se suivent et se ressemblent: failles du système éducatif et judiciaire ("...la connaissance de la langue est le dernier terme de la science... la justice est d'une vénalité sans exemple..."), manque d'honnêteté des commerçants, etc. Bref, les arguments de Voltaire et des physiocrates en faveur de la Chine le laisseront indifférent, à moins que:
...on nous apporte de Pekin des ouvrages de philosophie supérieurs à ceux de Descartes & de Locke; des traités de mathématique à placer à coté de ceux de Newton, de Leibnitz & de leurs successeurs; des morceaux de poésie, d'éloquence, de littérature & d'érudition que nos grands écrivains daignent lire, & dont ils soient forcés d'avouer la profondeur, la grace, le goût & la finesse; [...] des instruments de physique, des machines où notre infériorité soit bien démontrée [2].
[1] Financial Times, 26 octobre 2011.
[2] A propos des "machines", voici justement M. Anderlini: "...some top Chinese scientists were quick to dismiss the invention of Tianhe-1, the world's fastest supercomputer, as little more a than propaganda stunt and it soon emerged that almostall the chips used to build the machine were made by Intel and Nvidia, a US computer animation company".
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Thursday, March 8, 2012
DIDEROT, RAYNAL & THE RULE OF LAW
"La liberté, c'est-à-dire la garantie politique de la justice" — Mme de Staël
AM | @agumack
The purpose of this post is to put togheter, in one place, most (if not all) of Diderot's and Raynal's statements on: (a) the separation of powers as it regards the judiciary; (b) the rule of law, or equality before the law; (c) judges' tenure; (d) judges' salaries; (e) judges' honesty and competence; (f) due process of law or forme judiciaire; (g) precedents as a formal source of law. Needless to say, it will take a while to complete. I will endeavour to update this post as frequently as I can. If it gets too big, I will split it into two or three additional posts. Meanwhile, you can check it out on the right side of the blog. (Suggestions and ideas are more than welcome). Here are some of my very first picks:
The separation of powers
. Diderot: "Si le gouvernement se constitue juge de l’abus, il ne tardera pas à se constituer juge de l’us; & toute veritable notion de propriété & de liberté sera détruite […] Partout où vous verrez l’autorité aller plus loin, dites hardiment que les peuples sont exposés à la dépredation" (HDI 1780, ix.28, pp. 455-456) [Portugal and her colonies].
. Raynal: "En quelque lieu du monde ou par quelque motif que ce puisse être, l’autorité ne doit point s’asseoir à la place de la justice" (HDI 1780, xiii.54) [French colonies].
. Raynal: "Les intendans décident seuls de l’emploi des finances, & en règlent pour l’ordinaire le recouvrement. Ils appellent trop souvent devant eux les affaires civiles ou criminelles; soit que la justice n’en ait pas encore pris connoissance, soit qu’elles aient été déja portées aux tribunaux même supérieurs: c’est ce qu’on appelle administration" (HDI 1780, xiii.56) [French colonies].
. Raynal: "Par-tout où il n’y a ni loix fixes, ni justice, ni formes constantes, ni propriétés réelles, le magistrat est peu de chose, ou n’est rien; il attend un signe pour être ce qu’on voudra" (HDI 1780, xiv.2) [French colonies].
The rule of law
. Diderot: "La loi n'est rien, si ce n'est pas un glaive qui se promène indistinctement sur toutes les etes, & qui abat ce qui s'élève au dessus du plan horizontal sur lequel il se meut. La loi ne commande à personne ou commande à tous. Devant la loi, ainsi que devant Dieu, tous sont égaux"
(HDI 1780, i.15, p. 86) [Ceylan].
. Diderot "Le fisc lui-même doit se libérer par les voies & les règles de la justice" (HDI 1780, xiii.54) [French colonies].
. Raynal: "Ce ne sont pas des hommes qui doivent gouverner les hommes, c’est la loi. Otez aux administrateurs cette mesure commune, cette règle de leurs jugemens; il n’y aura plus de droit, plus de sûreté, ni de liberté civile." (HDI 1780.xiii.54) [French colonies].
. Raynal: "Cependant il étoit aisé de tarir la source de ces désordres, en mettant à la place du gouverneur militaire, violent en lui-même, & fait pour des tems de crise & de péril, une législation modérée, fixe & indépendante des volontés particulières. (HDI 1780.xiii.56) [French colonies].
. Deleyre: "A Venise, on procède juridiquement contre un patricien, contre un inquisiteur. On fait vendre ses biens; on se saisit de sa personne; on le conduit en prison" (HDI 1780, xix.2) [Venice].
Tenure
. Diderot: "Si tous les parlements sont dissous, et la France inondée de petits tribunaux composés de magistrats sans conscience comme sans autorité, et révocables au premier signe de leur maître, adieu tout privilège des états divers formant un principe correctif qui empêche la monarchie de dégénérer en despotisme" (Letter to Princess Ekaterina Romanovna Dashkoff, april 3, 1771).
. Diderot: "La justice est lente, mais elle se rend. Les magistrats sont amovibles; par cette raison, ils ne font point un mal qu'on pourrait leur rendre" (Voyage de Hollande, 1774).
Due process of law (forme judiciaire)
. Diderot: "Le despote fait tout ce qu'il veut, sans aucune forme" (Observations sur le Nakaz, 8).
. Diderot: "On y traite [...] des formes de la justice, sans lesquelles l'exercice en devient arbitraire" (HDI 1780, i.8, p. 43) [Brahma's laws].
. Diderot: "A des distances aussi grandes, quelle peut être l’énergie des loix de la métropole sur les sujets, & l’obéissance des sujets à ces loix? L’éloignement des témoins & des juges de nos actions, ne doit-il pas amener la corruption des mœurs, & avec le tems le déclin des institutions les plus sages, lorsque les vertus & la justice, leurs bases fondamentales, ne subsistent plus?" (HDI 1780, xiii.1) [colonies in general].
. Raynal: "On fit plus d’attention à l’établissement des loix criminelles d’Angleterre. C’étoit un des plus heureux présens que pût recevoir le Canada. Auparavant, un coupable, vrai où présumé, étoit saisi, jetté dans une prison, interrogé, sans connoître, ni son délit, ni son accusateur, sans pouvoir appeller auprès de lui, ou ses parens, ou ses amis, ou des conseils. On lui faisoit jurer de dire la vérité, c’est-à-dire, de s’accuser lui-même, & pour comble d’absurdité, sans attacher aucune valeur à son témoignage. On s’étudioit ensuite à l’embarrasser de questions captieuses, dont il étoit plus facile au crime impudent qu’à l’innocence troublée de se démêler. On eût dit que la fonction d’un juge n’étoit que l’art subtil de trouver des coupables. On ne les confrontoit avec ceux qui avoient déposé contre lui qu’un instant avant le jugement qui prononçoit, ou l’absolution, ou le plus ample informé, ou la torture & le supplice. Dans le cas d’absolution, l’innocent obtenoit aucune indemnité. Au contraire, la sentence capitale étoit toujours suivie de confiscation: car telle est en abrégé la procédure criminelle Françoise. La Canadien conçut facilement & sentit vivement le prix d’une gislation qui ne laissoit subsister aucun de ces désordres" (HDI 1780, xvi.9) [French Canada; see].
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"La liberté, c'est-à-dire la garantie politique de la justice" — Mme de Staël
AM | @agumack
The purpose of this post is to put togheter, in one place, most (if not all) of Diderot's and Raynal's statements on: (a) the separation of powers as it regards the judiciary; (b) the rule of law, or equality before the law; (c) judges' tenure; (d) judges' salaries; (e) judges' honesty and competence; (f) due process of law or forme judiciaire; (g) precedents as a formal source of law. Needless to say, it will take a while to complete. I will endeavour to update this post as frequently as I can. If it gets too big, I will split it into two or three additional posts. Meanwhile, you can check it out on the right side of the blog. (Suggestions and ideas are more than welcome). Here are some of my very first picks:
The separation of powers
. Diderot: "Si le gouvernement se constitue juge de l’abus, il ne tardera pas à se constituer juge de l’us; & toute veritable notion de propriété & de liberté sera détruite […] Partout où vous verrez l’autorité aller plus loin, dites hardiment que les peuples sont exposés à la dépredation" (HDI 1780, ix.28, pp. 455-456) [Portugal and her colonies].
. Raynal: "En quelque lieu du monde ou par quelque motif que ce puisse être, l’autorité ne doit point s’asseoir à la place de la justice" (HDI 1780, xiii.54) [French colonies].
. Raynal: "Les intendans décident seuls de l’emploi des finances, & en règlent pour l’ordinaire le recouvrement. Ils appellent trop souvent devant eux les affaires civiles ou criminelles; soit que la justice n’en ait pas encore pris connoissance, soit qu’elles aient été déja portées aux tribunaux même supérieurs: c’est ce qu’on appelle administration" (HDI 1780, xiii.56) [French colonies].
. Raynal: "Par-tout où il n’y a ni loix fixes, ni justice, ni formes constantes, ni propriétés réelles, le magistrat est peu de chose, ou n’est rien; il attend un signe pour être ce qu’on voudra" (HDI 1780, xiv.2) [French colonies].
The rule of law
. Diderot: "La loi n'est rien, si ce n'est pas un glaive qui se promène indistinctement sur toutes les etes, & qui abat ce qui s'élève au dessus du plan horizontal sur lequel il se meut. La loi ne commande à personne ou commande à tous. Devant la loi, ainsi que devant Dieu, tous sont égaux"
(HDI 1780, i.15, p. 86) [Ceylan].
. Diderot "Le fisc lui-même doit se libérer par les voies & les règles de la justice" (HDI 1780, xiii.54) [French colonies].
. Raynal: "Ce ne sont pas des hommes qui doivent gouverner les hommes, c’est la loi. Otez aux administrateurs cette mesure commune, cette règle de leurs jugemens; il n’y aura plus de droit, plus de sûreté, ni de liberté civile." (HDI 1780.xiii.54) [French colonies].
. Raynal: "Cependant il étoit aisé de tarir la source de ces désordres, en mettant à la place du gouverneur militaire, violent en lui-même, & fait pour des tems de crise & de péril, une législation modérée, fixe & indépendante des volontés particulières. (HDI 1780.xiii.56) [French colonies].
. Deleyre: "A Venise, on procède juridiquement contre un patricien, contre un inquisiteur. On fait vendre ses biens; on se saisit de sa personne; on le conduit en prison" (HDI 1780, xix.2) [Venice].
Tenure
. Diderot: "Si tous les parlements sont dissous, et la France inondée de petits tribunaux composés de magistrats sans conscience comme sans autorité, et révocables au premier signe de leur maître, adieu tout privilège des états divers formant un principe correctif qui empêche la monarchie de dégénérer en despotisme" (Letter to Princess Ekaterina Romanovna Dashkoff, april 3, 1771).
. Diderot: "La justice est lente, mais elle se rend. Les magistrats sont amovibles; par cette raison, ils ne font point un mal qu'on pourrait leur rendre" (Voyage de Hollande, 1774).
Due process of law (forme judiciaire)
. Diderot: "Le despote fait tout ce qu'il veut, sans aucune forme" (Observations sur le Nakaz, 8).
. Diderot: "On y traite [...] des formes de la justice, sans lesquelles l'exercice en devient arbitraire" (HDI 1780, i.8, p. 43) [Brahma's laws].
. Diderot: "A des distances aussi grandes, quelle peut être l’énergie des loix de la métropole sur les sujets, & l’obéissance des sujets à ces loix? L’éloignement des témoins & des juges de nos actions, ne doit-il pas amener la corruption des mœurs, & avec le tems le déclin des institutions les plus sages, lorsque les vertus & la justice, leurs bases fondamentales, ne subsistent plus?" (HDI 1780, xiii.1) [colonies in general].
. Raynal: "On fit plus d’attention à l’établissement des loix criminelles d’Angleterre. C’étoit un des plus heureux présens que pût recevoir le Canada. Auparavant, un coupable, vrai où présumé, étoit saisi, jetté dans une prison, interrogé, sans connoître, ni son délit, ni son accusateur, sans pouvoir appeller auprès de lui, ou ses parens, ou ses amis, ou des conseils. On lui faisoit jurer de dire la vérité, c’est-à-dire, de s’accuser lui-même, & pour comble d’absurdité, sans attacher aucune valeur à son témoignage. On s’étudioit ensuite à l’embarrasser de questions captieuses, dont il étoit plus facile au crime impudent qu’à l’innocence troublée de se démêler. On eût dit que la fonction d’un juge n’étoit que l’art subtil de trouver des coupables. On ne les confrontoit avec ceux qui avoient déposé contre lui qu’un instant avant le jugement qui prononçoit, ou l’absolution, ou le plus ample informé, ou la torture & le supplice. Dans le cas d’absolution, l’innocent obtenoit aucune indemnité. Au contraire, la sentence capitale étoit toujours suivie de confiscation: car telle est en abrégé la procédure criminelle Françoise. La Canadien conçut facilement & sentit vivement le prix d’une gislation qui ne laissoit subsister aucun de ces désordres" (HDI 1780, xvi.9) [French Canada; see].
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Wednesday, March 7, 2012
Miércoles, 7 de Marzo 2012
Diderot y el despotismo I - Absolutismo, jansenismo y poder judicial, por Lorenzo Peña (IFS-CCHF, CSIC)
11:00 horas. Sala José Gaos 3C
3ra Sesión del Seminario Theoria cum Praxi
Organiza: Grupo de Estudios Lógico-Jurídicos (Jurilog)
Coordinadores: Lorenzo Peña y Roberto R. Aramayo (IFS-CCHF-CSIC)
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L'HISTOIRE DES DEUX INDES & L'AFRIQUE DU NORD
AM | @agumack
Abstraction faite des (considérables) préjugés de l'époque, le Livre XI de l'Histoire des deux Indes peint un tableau de l'Afrique du Nord qui maintient quelques éléments d'actualité: autoritarisme politique, absence de représentation, instabilité du droit de propriété, manque de crédit. J'avoue que j'hésitais à écrire sur un sujet si sensible. Un article récent de l'économiste péruvien Hernando de Soto sur la Tunisie, et un autre sur la Lybie, publié ce matin dans El País, m'ont fait changer d'avis (*).
En fait, l'économie politique telle que l'envisageaient Raynal et Diderot est d'une surprenante actualité. Voici, de façon très schématique, ses principaux éléments: sous le despotisme, pas de droit de propriété; sans droit de propriété, pas de crédit; sans crédit, pas d'innovation, pas de commerce; sans innovation et sans commerce, pauvreté et "inégalité factice des fortunes & des conditions, qui naît de l’oppression & la reproduit" (HDI 1780, xvii.4). C'est bien pourquoi Raynal écrit: "Le despotisme des gouvernemens prépare de loin la révolte des peuples".
. Aux yeux de leurs maîtres, ce ne sont que des animaux nécessaires à la culture. On dispose arbitrairement de leurs biens & de leur vie, sans que ces actes d’injustice ou de cruauté aient jamais provoqué la vengeance du gouvernement (xi. 2).
. Les intérêts du pacha ne sont pas plus respectés que ceux du sultan. La milice même ne touche jamais sa solde entière, & les citoyens de tous les ordres sont habituellement dépouillés (xi.2).
. Si jamais l’Egypte sort de l’anarchie où elle est plongée; s’il s’y forme un gouvernement indépendant & que la nouvelle constitution soit fondée sur des loix sages: cette région redeviendra ce qu’elle fut, une des plus industrieuses & des plus fertiles de la terre. Il seroit absurde d’annoncer les mêmes prospérités à la Lybie (xi.3).
. Les pachas ou vice-rois chargés de conduire les pays assujettis, y portèrent cet esprit de ravage dont leur nation a laissé par-tout des traces ineffaçables. Ce n’étoient pas seulement les peuples qui étoient exposés à des rapines perpétuelles: l’oppression s’étendoit sur les troupes, quoique toutes Ottomanes [...] Alger, Tunis, Tripoli, reçurent la même législation. C’est une espèce d’aristocratie (xi.4).
. Il est rare que ces élections se fassent sans effusion de sang; & il est ordinaire qu’un homme élu dans le carnage soit massacré dans la suite, par des gens inquiets, qui veulent s’emparer de sa place, ou la vendre pour s’avancer (xi.4).
. Ce précieux métal, arrivé à Maroc, n’y circule, que très-rarement. Il y est enterré, comme dans tous les gouvernemens où les fortunes ne sont pas assurées. C’est encore la destinée de l’argent que les Européens introduisent dans l’empire par les neuf rades qui leur sont ouvertes (xi.8).
. Ses habitans [Salé, Maroc] étoient à la fois marchands & corsaires. Ils ont à-peu-près cessé d’exercer l’une & l’autre de ces professions, après avoir été subjugés & dépouillés de leurs richesses par le monarque actuel (xi.8).
(*) Voici Hernando de Soto au sujet de la révolution tunisienne: "Bouazizi immolated himself in a terrible suicide because he never got a right to the land his house was built on, which could have been used for credit to develop his business, for example, to buy a truck. He was never able to get an official right to put a stall in a public place and so, he never had a property right to it"; voir aussi Maite Rico: "Las milicias se adueñan de Libia", El País.
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AM | @agumack
Abstraction faite des (considérables) préjugés de l'époque, le Livre XI de l'Histoire des deux Indes peint un tableau de l'Afrique du Nord qui maintient quelques éléments d'actualité: autoritarisme politique, absence de représentation, instabilité du droit de propriété, manque de crédit. J'avoue que j'hésitais à écrire sur un sujet si sensible. Un article récent de l'économiste péruvien Hernando de Soto sur la Tunisie, et un autre sur la Lybie, publié ce matin dans El País, m'ont fait changer d'avis (*).
En fait, l'économie politique telle que l'envisageaient Raynal et Diderot est d'une surprenante actualité. Voici, de façon très schématique, ses principaux éléments: sous le despotisme, pas de droit de propriété; sans droit de propriété, pas de crédit; sans crédit, pas d'innovation, pas de commerce; sans innovation et sans commerce, pauvreté et "inégalité factice des fortunes & des conditions, qui naît de l’oppression & la reproduit" (HDI 1780, xvii.4). C'est bien pourquoi Raynal écrit: "Le despotisme des gouvernemens prépare de loin la révolte des peuples".
. Aux yeux de leurs maîtres, ce ne sont que des animaux nécessaires à la culture. On dispose arbitrairement de leurs biens & de leur vie, sans que ces actes d’injustice ou de cruauté aient jamais provoqué la vengeance du gouvernement (xi. 2).
. Les intérêts du pacha ne sont pas plus respectés que ceux du sultan. La milice même ne touche jamais sa solde entière, & les citoyens de tous les ordres sont habituellement dépouillés (xi.2).
. Si jamais l’Egypte sort de l’anarchie où elle est plongée; s’il s’y forme un gouvernement indépendant & que la nouvelle constitution soit fondée sur des loix sages: cette région redeviendra ce qu’elle fut, une des plus industrieuses & des plus fertiles de la terre. Il seroit absurde d’annoncer les mêmes prospérités à la Lybie (xi.3).
. Les pachas ou vice-rois chargés de conduire les pays assujettis, y portèrent cet esprit de ravage dont leur nation a laissé par-tout des traces ineffaçables. Ce n’étoient pas seulement les peuples qui étoient exposés à des rapines perpétuelles: l’oppression s’étendoit sur les troupes, quoique toutes Ottomanes [...] Alger, Tunis, Tripoli, reçurent la même législation. C’est une espèce d’aristocratie (xi.4).
. Il est rare que ces élections se fassent sans effusion de sang; & il est ordinaire qu’un homme élu dans le carnage soit massacré dans la suite, par des gens inquiets, qui veulent s’emparer de sa place, ou la vendre pour s’avancer (xi.4).
. Ce précieux métal, arrivé à Maroc, n’y circule, que très-rarement. Il y est enterré, comme dans tous les gouvernemens où les fortunes ne sont pas assurées. C’est encore la destinée de l’argent que les Européens introduisent dans l’empire par les neuf rades qui leur sont ouvertes (xi.8).
. Ses habitans [Salé, Maroc] étoient à la fois marchands & corsaires. Ils ont à-peu-près cessé d’exercer l’une & l’autre de ces professions, après avoir été subjugés & dépouillés de leurs richesses par le monarque actuel (xi.8).
(*) Voici Hernando de Soto au sujet de la révolution tunisienne: "Bouazizi immolated himself in a terrible suicide because he never got a right to the land his house was built on, which could have been used for credit to develop his business, for example, to buy a truck. He was never able to get an official right to put a stall in a public place and so, he never had a property right to it"; voir aussi Maite Rico: "Las milicias se adueñan de Libia", El País.
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Monday, March 5, 2012
DIDEROT ON 'JUDICIAL INDEPENDENCE' (I)
"Regina mundi forma" — Diderot
AM | @agumack
The notion of 'judicial independence' plays an important role in Histoire des deux Indes and, more broadly, in Diderot's political thought. It is a complex issue, and it is bound to take more than one post. In early 1766, the Parisian philosophes were debating a thorny issue raised by Beccaria: "...la faculté de juger, ma non dipendente da quella con immediata podestà. M. d'Alembert, M. Diderot, plusieurs de nos amis et moi, nous n'avons jamais pu entendre cet endroit" (*). In Nakaz 39, Diderot declares: "Je pense que ces deux puissances [législative et exécutrice] doivent être séparées de la magistrature".
It seems to me that Diderot's thinking on 'judicial independence' is organized around the following themes: (1) judges' honesty and competence; (2) judges' tenure; (3) budget issues, including judges' salaries; (4) due process of law or forme judiciaire. Surprisingly (or not), the notion of stare decisis —precedents as a formal source of law— does not seem to count at all. I'll come back to these points in the coming days and weeks. For now, I leave you with Diderot's sensational April 1771 letter to Princess Ekaterina Romanovna Dashkoff, in which the problem of tenure is sketched in a way entirely worthy of Montesquieu, his maître à penser
Chaque siècle a son esprit qui le caractérise. L’esprit du nôtre semble être celui de la liberté ... Nous touchons à une crise qui aboutira à l’esclavage ou à la liberté ; si c’est à l’esclavage, ce sera un esclavage semblable à celui qui existe au Maroc ou à Constantinople. Si tous les parlements sont dissous, et la France inondée de petits tribunaux composés de magistrats sans conscience comme sans autorité, et révocables au premier signe de leur maître, adieu tout privilège des états divers formant un principe correctif qui empêche la monarchie de dégénérer en despotisme.
(*) Morellet to Beccaria, January 3, 1766, in Cesare Beccaria. Dei delitti e delle pene. A cura di Franco Venturi. Torino: Einaudi, 1994, p. 353.
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"Regina mundi forma" — Diderot
AM | @agumack
The notion of 'judicial independence' plays an important role in Histoire des deux Indes and, more broadly, in Diderot's political thought. It is a complex issue, and it is bound to take more than one post. In early 1766, the Parisian philosophes were debating a thorny issue raised by Beccaria: "...la faculté de juger, ma non dipendente da quella con immediata podestà. M. d'Alembert, M. Diderot, plusieurs de nos amis et moi, nous n'avons jamais pu entendre cet endroit" (*). In Nakaz 39, Diderot declares: "Je pense que ces deux puissances [législative et exécutrice] doivent être séparées de la magistrature".
It seems to me that Diderot's thinking on 'judicial independence' is organized around the following themes: (1) judges' honesty and competence; (2) judges' tenure; (3) budget issues, including judges' salaries; (4) due process of law or forme judiciaire. Surprisingly (or not), the notion of stare decisis —precedents as a formal source of law— does not seem to count at all. I'll come back to these points in the coming days and weeks. For now, I leave you with Diderot's sensational April 1771 letter to Princess Ekaterina Romanovna Dashkoff, in which the problem of tenure is sketched in a way entirely worthy of Montesquieu, his maître à penser
Chaque siècle a son esprit qui le caractérise. L’esprit du nôtre semble être celui de la liberté ... Nous touchons à une crise qui aboutira à l’esclavage ou à la liberté ; si c’est à l’esclavage, ce sera un esclavage semblable à celui qui existe au Maroc ou à Constantinople. Si tous les parlements sont dissous, et la France inondée de petits tribunaux composés de magistrats sans conscience comme sans autorité, et révocables au premier signe de leur maître, adieu tout privilège des états divers formant un principe correctif qui empêche la monarchie de dégénérer en despotisme.
(*) Morellet to Beccaria, January 3, 1766, in Cesare Beccaria. Dei delitti e delle pene. A cura di Franco Venturi. Torino: Einaudi, 1994, p. 353.
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Friday, March 2, 2012
DIDEROT, RAYNAL & LES TAUX D'INTÉRET: DEUX (AUTRES) SOURCES-CLÉ
"Le crédit est le grand ressort d'un État" — Diderot
AM | @agumack
En ce qui concerne les taux d'intérêt et le crédit dans l'Histoire des deux Indes, les sources de Diderot-Raynal sont nombreuses. Nous avons déjà parlé de François Bernier [voir]. Voici deux autres possibles sources: Ferdinando Galiani ('gourou' économique de Diderot dans les années 1760), et l'article DESPOTISME de l'Encyclopédie, où de Jaucourt reprend mot à mot l'excellente définition de Montesquieu sur l'usure naturalisée par le despotisme.
Dans Della moneta (1751), le jeune Galiani établit une distinction entre monnaie et crédit; il attribue la baisse des taux d'intérêt en Europe (depuis le XVe siècle) non pas à l'or et à l'argent en provenance de l'Amérique, mais à la dolcezza del governo. Le sentiment de sécurité qui résulte de cette dernière conduit tout naturellement à une expansion de l'offre de crédit:
Per render bassi gl'interessi secondo l'esposto di sopra basta evitare il monipolio del danaro, e assicurare la restituzione. Perciò non è stata la sola abbondanza de' metalli preziosi che ha sbassate e quasi estinte le usure da due secoli in qua; ma principalmente la dolcezza del governo quasi in ogni regno goduta. Sieno le liti brevi, la giustizia certa, molta industria ne' popoli, e parsimonia, e saranno tutti i ricchi inclinati a prestare. Là dove è folla di offerenti, non possono esser dure le condizioni dell'offerta. Così saranno i poveri trattati senza crudeltà.
L'influence de Montesquieu est encore plus nette chez De Jaucourt, qui reprend un magnifique morceau de l'Esprit des lois (V.15) sur l'usure: "La pauvreté & l’incertitude de la fortune y naturalisent l’usure, chacun augmentant le prix de son argent à proportion du péril qu’il y a le prêter. La misère vient de toutes parts dans ces pays malheureux; tout y est ôté, jusqu'à la ressource des emprunts" (*). On remarquera la ressemblance avec Diderot: "...il faut que l’intérêt de la somme prêtée soit d’autant plus grand que les sûretés sont moindres" (HDI 1780, xvi.1).
(*) "...des fortunes" dans Montesquieu. Selon Jean Lacouture, Diderot et d'Alembert avaient demandé à Montesquieu d'écrire l'article DESPOTISME.
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"Le crédit est le grand ressort d'un État" — Diderot
AM | @agumack
En ce qui concerne les taux d'intérêt et le crédit dans l'Histoire des deux Indes, les sources de Diderot-Raynal sont nombreuses. Nous avons déjà parlé de François Bernier [voir]. Voici deux autres possibles sources: Ferdinando Galiani ('gourou' économique de Diderot dans les années 1760), et l'article DESPOTISME de l'Encyclopédie, où de Jaucourt reprend mot à mot l'excellente définition de Montesquieu sur l'usure naturalisée par le despotisme.
Dans Della moneta (1751), le jeune Galiani établit une distinction entre monnaie et crédit; il attribue la baisse des taux d'intérêt en Europe (depuis le XVe siècle) non pas à l'or et à l'argent en provenance de l'Amérique, mais à la dolcezza del governo. Le sentiment de sécurité qui résulte de cette dernière conduit tout naturellement à une expansion de l'offre de crédit:
Per render bassi gl'interessi secondo l'esposto di sopra basta evitare il monipolio del danaro, e assicurare la restituzione. Perciò non è stata la sola abbondanza de' metalli preziosi che ha sbassate e quasi estinte le usure da due secoli in qua; ma principalmente la dolcezza del governo quasi in ogni regno goduta. Sieno le liti brevi, la giustizia certa, molta industria ne' popoli, e parsimonia, e saranno tutti i ricchi inclinati a prestare. Là dove è folla di offerenti, non possono esser dure le condizioni dell'offerta. Così saranno i poveri trattati senza crudeltà.
L'influence de Montesquieu est encore plus nette chez De Jaucourt, qui reprend un magnifique morceau de l'Esprit des lois (V.15) sur l'usure: "La pauvreté & l’incertitude de la fortune y naturalisent l’usure, chacun augmentant le prix de son argent à proportion du péril qu’il y a le prêter. La misère vient de toutes parts dans ces pays malheureux; tout y est ôté, jusqu'à la ressource des emprunts" (*). On remarquera la ressemblance avec Diderot: "...il faut que l’intérêt de la somme prêtée soit d’autant plus grand que les sûretés sont moindres" (HDI 1780, xvi.1).
(*) "...des fortunes" dans Montesquieu. Selon Jean Lacouture, Diderot et d'Alembert avaient demandé à Montesquieu d'écrire l'article DESPOTISME.
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Monday, February 27, 2012

AM | @agumack
Voici la deuxième partie de mon analyse —à l'aide de techniques dites de "Humanities 2.0" — de l'article publié par "Un Ciudadano" le 20 novembre 1810 dans la Gazeta Extraordinaria de Buenos-Ayres. Raynal et l'Histoire des deux Indes sont présents, bien entendu. Mais cette deuxième partie révèle surtout l'importance d'Helvétius. L'auteur, Mariano Moreno (ou Gregorio Funes), connait à la perfection De l’esprit et De l’homme. D'autre part, je crois avoir décelé la présence d'une édition de l'Esprit des lois avec des notes d'Helvétius: Œuvres complètes de Montesquieu, nouvelle édition avec des notes d’Helvétius sur l’esprit des lois. Paris: Didot, 1795.
De toute évidence, les bibliothèques de Buenos Aires étaient bien garnies ! Les révolutionnaires du Río de la Plata sont, à l'horizon 1810, à la recherche d'un vocabulaire républicain. Ils vont le puiser dans les textes des "Lumières radicales": Raynal, Diderot, Helvétius, d'Holbach, Condorcet, Volney, etc. Ce sont moins les idées d'Helvétius —sur l'importance des passions, par exemple— que ses prouesses en matière d'éloquence qui attirent l'écrivain porteño. D'ailleurs, c'est exactement ce que pensait David Hume peu après la publication de De l'esprit en 1758 (*).
* * *
Una autoridad sin freno es capaz de corromper al hombre mas virtuoso [1]. Nadie que conozca la frágil naturaleza del hombre puede dudar de esta verdad. Las pasiones, esos eternos enemigos del bien publico [2], armadas de una autoridad ilimitada, arrastran al Monarca, hasta el extremo de no conocer otro interés que el suyo propio, y desde el momento que súbditos no pueden desobedecer sin riesgo, ellos mismos vienen á ser los instrumentos de su avaricia, de su ambicion [3], y sus rapiñas. Algunas veces la naturaleza coloca sobre los tronos unos genios bienhechores [4]; y como si despues se arrepintiera, venga su falta con una larga série de príncipes ineptos, cuyo poder absoluto es el azote de la humanidad [5].
La constitucion de España dio á nacion los Monarcas revestidos de toda esta autoridad. Hubiera sido un prodigio de virtud [6] desconocido en los análes del mundo [7], que tarde o temprano no llegasen á los excesos de la arbitrariedad. Defectuosa esa constitucion por no haber puesto á sus Reyes en la feliz incapacidad [8] de hollar las leyes [9] inmutables, y fundamentales del orden, llegaron muchos de ellos á reconcentrar en sí mismos todo el reyno, y al paso que esclavos de sus ministros, se hicieron tiranos de sus vasallos. La nacion entonces no teniendo bastante energía para resistir abusos que el tiempo había erigido en principios [10], desespero de su destino [11], y se abandonó á la discrecion [12] del despotismo. Quando faltasen pruebas de esta verdad, sobrarían los males que la afligen. El despotismo es quien la ha puesto en el último declive de su ruina.
Si el despotismo al abrigo de una constitucion defectuosa [13] hizo tantos progresos en España, ¿qué deberia suceder en América, donde entraba por fórmula? Otro camino mas breve, aunque mas estrepitoso, llevó á esos mismos Reyes á la cima del despotismo en estos imperios. Ellos se formaron de la fuerza el único titulo de su dominacion. Despues de haberse jugado con los hombres por medio de los conquistadores, es á precio de su sangre [14] que compraron el derecho de gobernarlos. Las vidas de los que escaparon de estos estragos [15] no fueron miradas en adelante, sino como un don gratuito debido á su clemencia. Despues de estas ideas, ¿será posible concebir otra regla de la administracion [16], que la voluntad, y el interés del Soberano? No por cierto.
Todo ha concurrido [17] en América á entronizar el poder absoluto y arbitrario [18]. La opinion pública es la soberana de los hombres aun con prejuicio muchas veces de la razón. Echese una hojeada sobre la historia moral de las naciones [19], y se verá que no hay opinion tan absurda, que no haiga tenido pueblos enteros por sectarios. No hay sacrificios á que no les encuentre dispuestos, quando lo pide la opinion.
[1] UNA AUTORIDAD SIN FRENO ES CAPAZ DE CORROMPER AL HOMBRE MAS VIRTUOSO. Phrase de Fénelon: “…une autorité sans frein corrompt facilement l’homme le plus vertueux”; Fénelon cite ou traduit les Histoires d'Hérodote (Essai sur le gouvernement civil, dans Principes de Messieurs Bossuet et Fénelon. Paris: 1791, p. 235). C'est la seule édition antérieure à 1810.
[2] A noter la contradiction avec l'apologie des passions chez Helvétius. C'est qu'entretemps, la Révolution française a eu lieu...
[3] INSTRUMENTO DE SU AVARICIA, DE SU AMBICIÓN. Helvétius: “…un instrument de son avarice…” (De l’homme, 1773, Tome I, i.12, p. 45). Ce fragment provient d'un chapitre très violent contre l'Eglise. Voir aussi: “…vil instrument de l’ambition papale” (De l’homme, 1773, Tomo II, vii.7, p. 167). Preuves à l'appui!
[4] GENIOS BIENHECHORES. Helvétius: “…l’homme de génie le bienfaiteur de l’humanité…” (De l’esprit, 1758, iv.10, p. 146).
[5] EL AZOTE DE LA HUMANIDAD. Helvétius: “Le Despotisme, ce cruel fléau de l’humanité…” (De l’homme, 1773, Tome II, v.9, nota 30, p. 68).
[6] UN PRODIGIO DE VIRTUD. Rousseau: “…d’abord un prodige de vertu” (Rousseau juge de Jean-Jacques, in Collection complete des Œuvres de Jean-Jacques Rousseau, Tome 22. Genève: 1782, p. 15). Raynal: “…ce prodige inoui de vertu ne pouvoit durer.” (HDI 1780, ii.22, p. 465).
[7] LOS ANALES DEL MUNDO. D’Holbach: “…les délires des Rois sont inscrits dans les Annales du monde…” (Politique naturelle, ou discours sur les vrais principes du gouvernement, ix.4, Londres, 1773, Tome II, p. 231).
[8] FELIZ INCAPACIDAD. Helvetius: “…le roi, borné dans son pouvoir, se trouve dans l’heureuse impuissance de nuire à ses sujets?” (De l’esprit, 1758, iii.11).
[9] HOLLAR LAS LEYES. Bacon: “…soüiller les loix de la Charité & de la Société humaine.” (Œuvres morales et politiques de Messire François Bacon. Paris, 1637, p. 20). C'est une possibilité.
[10] ERIGIDO EN PRINCIPIOS. Note d'Helvétius sur l'Esprit des lois de Montesquieu: “…c’est ériger les faits en principes…” (Œuvres complètes de Montesquieu, nouvelle édition avec des notes d’Helvétius sur l’esprit des lois, Tome 2. Paris: Didot, 1795, pp. 16-17.)
[11] DESESPERO DE SU DESTINO. Vers de Voltaire dans Oreste: “Mais de notre destin pourquoi désespérer?” (Œuvres complètes de Voltaire, Tome 4, 1784, p. 37).
[12] ABANDONÓ Á LA DISCRECION. Article de “T – n”: ALEXANDRE I (Histoire d’Égypte), Supplément de l’Encyclopédie, Tome 1, p. 265: “…pour s’abandonner à la discrétion d’une mère…”
[13] CONSTITUCION DEFECTUOSA. Raynal: “…ce que la constitution avoit de défectueux…” (HDI 1780, xix.2, p. 60).
[14] CONQUISTADORES, A PRECIO DE SU SANGRE. Raynal: “…aux conquérans pour prix de leur sang…” (HDI 1780, vi.15, p. 450).
[15] ESCAPARON DE ESTOS ESTRAGOS. Raynal: “…échappées aux ravages des guerres & des tems…” (HDI 1780, i.8, p. 34).
[16] REGLA DE LA ADMINISTRACION. Mably: “Un Prince ne viole jamais quelque règle de l’administration générale…” Doutes sur l’ordre naturel des sociétés politiques, in Collection complète des Œuvres politiques, philosophiques et morales de l’abbé de Mably, Tome 9. Paris: Desray, 1794, p. 80).
[17] TODO HA CONCURRIDO. Raynal: “Tout a concouru depuis deux siècles…” (HDI 1780, xix.1). Texte d'Alexandre Deleyre; Moreno a lu le Tableau de l'Europe pour sa Representación de los hacendados de 1809.
[18] PODER ABSOLUTO Y ARBITRARIO. Raynal: “…dans l’exercise arbitraire d’un pouvoir absolu” (HDI 1780, xiii.51, p. 261).
[19] LA HISTORIA MORAL DE LAS NACIONES. Helvétius: “Je consulterai d’abord l’histoire des Nations” (De l’homme, 1773, Tome 1, IV.i, p. 279).
(*) David Hume à Adam Smith, 12 avril 1759: "I believe I have mentioned to you already Helvetius’s Book de l’Esprit. It is worth your Reading, not for its Philosophy, which I do not highly value, but for its agreeable Composition".
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